cliquez pour voir la carte

CHER
Bourges

On risque bien de ne jamais arriver à Bourges si l'on se laisse un peu trop prendre aux charmes de la route.  EtDieu sait s'ils sont nombreux, que l'on vienne d'Orléans ou de Gien.

D'Orléans,  c'est par le coeur de la Sologne mouillée que passera votre chemin. Résisterez-vous alors à la petite auberge solognote qui propose ingénument un civet de lièvre ou un cuissot de chevreuil, ou à la tour d'un château aperçue entre deux arbres ? Nous sommes ici en plein drame historique et la forêt résonne encore des fabuleuses chevauchées de la guerre de Cent-Ans.

Mais si vous passez par Gien la fleurie, perchée sur les bords de la Loire, le charme insinuant de l'histoire fera pour vous une place à  celui du Sancerre,  vin sec comme une cavalcade, mais subtil et fruité comme cette dame de beauté qui, au milieu du xvème siècle attendait le roi Charles VII dans son château tout proche.

N'ayez pas trop de remords, Bourges mérite cette approche un peu lente. Vieille ville gallo-romaine, de son ancienne enceinte médiévale, elle a conservé le tracé tournant de ses rues qui,  dans un jeu de perspectives savant, présente tour à  tour les images d'un Moyen Âge prospère et commerçant, religieux et artistique, entreprenant et cultivé.

Notre histoire à nous commence à la fin de celle-là. Au pied de la vieille ville, place Cujas, les bâtiments noircis de l'École des Beaux-Arts n'évoquent pas l'aventure chevaleresque si vivante ailleurs ! Et pourtant !

C'est  en effet ici,  dans ce qui fut autrefois le collège jésuite construit par l'architecte Martellange au xviième siècle, selon les canons jésuites de l'époque, que s'est joué, pour une bonne part, le destin de la Nouvelle-France à ses débuts.

Le père Noyrot et le père Coton y étudient et y enseignent avant de devenir les confesseurs de deux personnages célèbres.

Confesseur d'Henri IV, le père Coton n'a pas toujours le travail facile et s'il doit, pour être accomodant, proposer à son pénitent de jurer plutôt jarnicoton (je renie Coton) que jarnidieu, il se montre tout à fait intransigeant sur la nécessité d'une présence jésuite en Nouvelle-France.

Philibert Noyrot, son élève, pousse encore plus loin dans cette voie.  Il engage son propre pénitent, Henri de Lévis, duc de Ventadour, à devenir vice-roi de la Nouvelle-France, afin de commander et de financer le départ de quatre nouveaux missionnaires jésuites. Etquelles recrues!  Les pères Brébeuf, Lalemant, Massé et Noyrot lui-même.

Le père Noyrot en revient d'ailleurs très vite,  scandalisé parce qu'il a vu : la Nouvelle-France est aux mains de marchands calvinistes! Ce constat fera plus que tous les rapports de Champlain lui-même. Henri de Lévis  intervient auprès de Richelieu et de cette entrevue naîtra une idée capitale pour l'orientation de la Nouvelle-France. La colonie est en effet prise en main par une nouvelle compagnie, la Compagnie des Cent-Associés, qui s'engage à  peupler le Canada de colons catholiques,  à convertir les « sauvages » et à réglementer le commerce des fourrures.

Plusieurs habitants de Bourges ont quitté leur Berry natal pour grossir les rangs des colons en partance pour le Canada: Jeanne Charton, Antoine Juchereau, Sylvain Laurent dit Berrichon, qui épouse Angélique Masuret à Saint-Sulpice en 1766,  et Sébastien Roy.

EURE-ET-LOIR
Chartres

La route de Paris, qui traverse les célèbres plaines de la Beauce(grenier à blé de la France), nous mène droit vers la cathédrale dont la flèche se voit à des kilomètres à travers les champs.

En regardant la cathédrale apparaître la cathédrale au milieu des blés,  on comprend mieux l'émotion qui devait saisir la foule des Chrétiens qui, chaque année (coutume toujours vivante au mois de mai chez les étudiants parisiens), gagnait Chartres à pied. De nombreux colons firent ainsi ce pèlerinage comme c'était la tradition avant d'entreprendre un long et périlleux voyage.

Les relations entre Chartres et le Canada sont anciennes : Mgr de Laval, premier évêque de la Nouvelle-France était originaire de Chartres. Par ailleurs, Jean-Jacques Olier, créateur de la compagnie de Saint-Sulpice et cofondateur de Ville-Marie (qui deviendra Montréal), avait une vénération toute particulière pour la Vierge à qui il rendait à Chartres de nombreuses dévotions.

Mais les liens de Chartres avec le Canada ont quelque chose d'encore plus touchant. Parmi les missionnaires envoyés chez les Hurons et les Abénaquis, plusieurs provenaient de Chartres et étaient bien sûr très attachés à leur ville. Ils enseignèrent donc le culte de Notre-Dame de Chartres aux populations amérindiennes qu’ils évangélisaient. L’un d’eux, le père jésuite Martin Bouvart évangélisa  les Hurons à la mission de Lorette, et, en 1678, fit envoyer au chapitre de Chartres un ex-voto huron, sous la forme d’une ceinture que l’on appelle wampum en langue amérindienne, ornée de perles et portant une dédicace à la Vierge Marie. Le présent était accompagné d’une lettre en huron suivie de sa traduction en français.

En guise de remerciements, Chartres offrit aux Hurons une chemise en argent garnie pour partie de reliques. La nouvelle de l’offrande faite à Chartres par les Hurons se répandit rapidement parmi les populations amérindiennes, et en 1691, les Abénaquis firent eux aussi présent à Notre-Dame de Chartres d’un magnifique wampum. En retour, les chanoines de Chartres offrirent une statuette en argent de la Vierge à l’enfant, longtemps conservée à la mission Saint-François de Sales. Abénaquis et chanoines chartrains correspondirent jusqu’au milieu du xviiième siècle. Un troisième ex-voto très évocateur fut envoyé  à Chartres au xviième siècle par les nations amérindiennes : il s’agit d’une petite pirogue en écorce de    bouleau,   montée   par   cinq   rameurs,   qui   fut vraisemblablement offerte en remerciement d'un voeu fait lors d'un accident de navigation. Les deux ceintures  amérindiennes et la petite pirogue, connues sous le nom de « trésor indien de la cathédrale de Chartres », sont conservées dans les réserves du Musée des Beaux-Arts de Chartres.

Ces objets amérindiens, autrefois visibles dans la cathédrale, ont peut-être stimulé l’imagination des habitants de Chartres et éveillé la vocation de colons chez certains d’entre eux, tels que Jean-Noël Lemelin dit Tourangeau et Jean Garnier , qui prennent tous deux femme à Québec le premier en 1658, le second en 1668, Marie Langlois qui se marie à Cap-de-la-Madeleine en 1665, Pierre Roux qui se marie au Canada en 1670, et Gervais Beaudoin qui épouse Anne Aubert à Québec en 1683. D’autres allaient suivre, au xviiième siècle:  Charles Charon dit Larose et Cabanac, Jean-Barthélémy Desmarais, Nicolas Lacaille, Florent Michaud, Claude Morin et Louis Pelletier.

Mystérieuse Notre-Dame-de-sous-Terre, à qui furent dédiés les ex-voto amérindiens! Son histoire, liée à celle de la cathédrale,  évoque les premiers temps de la chrétienté. D'abord vénérée comme déesse mère à  l'époque gallo-romaine, les premiers chrétiens voient dans son culte une préfiguration de la mère de Dieu. Ils installent leur sanctuaire sur les lieux mêmes de la grotte païenne en conservant la statue antique. C'est donc au pied de cette statue détruite pendant la Révolution que les nouveaux chrétiens amérindiens envoyèrent leurs présents.

Sur cette crypte originelle, bien des monuments se sont succédés jusqu'à  l'édifice actuel qui, en même temps qu'une église de pèlerinage, est un des hauts lieux de l'art gothique.

Au portail royal de Chartres naît la grande statuaire gothique qui animera bientôt les ébrasements des cathédrales à Reims, à Strasbourg et à Chartres même, aux façades nord et sud.  Mais ici, au portail principal qui date de 1145, la ronde-bosse n'a pas encore trouvé son volume dans l'espace, ni le corps humain ses proportions. Les personnages bibliques sont de véritables “statues-colonnes ” fuselées et statiques aux traits gravés avec finesse.

À  l'intérieur, vous serez saisi par l'envoûtement bleu de la cathédrale (vitraux des xiième et xiiième siècles)  et vous comprendrez la ferveur des pèlerins défilant en chantant, autour du choeur sculpté du xvième siècle, avant de descendre les marches du sanctuaire.

EURE-ET-LOIR
Denonville

Ne tournons pas la page trop vite : la visite du château de Denonville sera peut-être l'occasion de la réhabilitation d'un de ces malaimés de l'histoire contre qui tout a conspiré.

Jacques-René de Brisay, marquis de Denonville est né ici en 1637, et on y conserve son portrait. C'était le troisième garçon d'une famille assez pauvre. Il fut donc orienté directement vers l'armée, avec laquelle il fit la guerre de Hollande et au sein de laquelle il se tailla une belle carrière.

A cette époque en Nouvelle-France, la guerre iroquoise a repris, aiguillonnée par lesAnglais. La situation est si délicate que Louis XIV, à  la faveur d'une accalmie de la guerre européenne, décide d'envoyer l'un de ses bons officiers pour rétablir la situation. Jacques- René de Brisay part donc en 1683 en tant que gouverneur de la colonie.

Dès son arrivée en Nouvelle-France, le nouveau gouverneur se montre plein de bonnes intentions et de bonnes idées qu'il s'attache à réaliser : création d'une école militaire et navale pour les jeunes Canadiens, réglementation du commerce des fourrures, fortification des villes. Bref,  il se montre actif et compétent, remet un peu Iroquois et Anglais à  leur place et peut se sentir satisfait de son travail, jusqu'au jour du massacre des habitants de Lachine, le5août 1689.

L'arrivée du comte de Frontenac qui vient le remplacer au poste de gouverneur et son rappel immédiat en France ont accrédité la thèse de sa disgrâce et de sa responsabilité. Maison sait maintenant que Louis XIV avait besoin delui dans son armée et que ce rappel avait plutôt les couleurs d'une promotion. Et ne jugeons pas trop vite l'homme qui s'est laissé surprendre par l'embuscade de Lachine, qu'aucun de ses généraux ne sut prévoir, ni contrecarrer.

Son château,  qu'il restaura lui-même à son retour du Canada, nous invite d'ailleurs à mieux le connaître. C'était à son époque un vieux bastion de famille qui s'était replié derrière ses tours et ses douves au temps des guerres de Religion, la famille étant protestante. Jacques-René fit rétablir un bâtiment de brique à coins de pierre suivant la mode de sa jeunesse, ainsi qu'une aile en pierre couverte d'un toit à la Mansart dans le goût du jour. Il traduisait ainsi les principaux traits de son caractère, entreprenant et sentimental.  À l'intérieur, les boiseries et la lampe enfer forgé de l'escalier rappellent le décor de son époque.  Ony voit aussi un trophée de cornes d’orignal qu'il rapporta du Canada. Une plaque en l’honneur de Jacques-René de Brisay de Denonville a été posée sur la façade du château par l’Association France-Canada.

EURE-ET-LOIR
Montigny-sur-Avre

Mgr François de Laval, premier évêque de Québec, est né au château de Montigny-sur-Avre, le 30 avril 1623. Cadet d'une branche cadette, il est d’abord destiné à l'Église, mais la mort de son père, suivie de celle de ses frères aînés,  remet tout en question. C'est alors que, tout en donnant tous ses soins au patrimoine paternel,  il prend conscience de sa vocation.

Il devient abbé de Montigny, le temps d'aider son jeune frère à  s'initier à l'administration de ses biens.  Puis il parachève sa formation au collège de La Flèche, au collège de Clermont à Paris, et à l'école de M. de Bernières de Louvigny,  de Caen.

Un petit groupe de disciples se réunit en effet autour du célèbre dévot laïc. C'est dans ce cénacle, “ l'Ermitage”,  où François de Laval fait de fréquentes retraites, qu'il apprend à connaître le Canada.  M. de Bernières est lui-même intimement lié à la fondation des Ursulines de Québec et à la création de Ville-Marie. On commente donc passionnément chez lui les Relations des Jésuites du Canada.

le château de Mgr de Montmorency de Laval

le château de Mgr de Montmorency de Laval

Il était à cette époque question de doter le Canada d'un évêché. Une telle décision s'avérait difficile, car leCanada était sous la direction théorique de l'évêché de Rouen. D'autre part,  les Jésuites, qui avaient pris au Canada une place prépondérante et dépendaient directement de Rome, s'opposaient à la nomination d'un évêque d'un autre ordre que le leur. C'est ainsi qu'après de nombreux pourparlers, François de Laval sembla finalement emporter tous les suffrages. Il fallut cependant l'intervention directe de la régente Anne pour imposer l'autorité de François de Laval au Canada.

Après ces débuts quelque peu mouvementés, et n'ayant pour commencer que le titre de vicaire apostolique, celui qui devait être en 1674 le premier évêque de Québec prêta serment de fidélité au roi et s'embarqua pour le Canada en avril 1659.

À  Montigny, la petite église paroissiale est resté et elle qu'elle était lorsque François de Laval en était curé. Ses parents y sont enterrés et il y fut lui-même probablement baptisé (un monumental bas-relief du sculpteur Henri Chartiery a été inauguré au moment de son tricentenaire en 1923). Bâtie en 1618, l'église est construite en pierre, mais sa voûte, soutenue par des poutres transversales,  est en bois comme dans la plupart des églises percheronnes.

Quant au château de Montigny, c'est une belle demeure classique du xviième siècle avec des fenêtres à encadrement de brique   et   deux ailes en retour qui se   reflètent mélancoliquement dans les eaux de l'Avre.  Ce château est aujourd'hui une propriété privée,  mais les visiteurs canadiens, s'ils en font la demande,  y seront toujours chaleureusement accueillis.

INDRE
Clion, château de l'Isle-Savary

Le château de l'Isle-Savary est l'un des plus importants châteaux de l'Indre.  L'île porte le nom des Savary, une des grandes familles du Berry, aujourd'hui éteinte, qui en furent propriétaires jusqu'au xiiième siècle. Guillaume de Varie, grand financier berrichon associé de JacquesCoeur,  l'acheta vers 1464.  Il fit démolir l'ancien édifice pour commencer la construction du château actuel que sa veuve,  remariée à  un conseiller des finances, acheva en 1470.

En1630,  le château fut acquis par Anne Phélypeaux de Pontchartrain, comtesse de Frontenac et châtelaine de Palluau. Veuve depuis 1662 et mère du petit Louis de Buade, comte de Frontenac et de Palluau,  elle s'occupait de la gestion de l'héritage de son beau-père et de son mari au nom de son fils.

Élevé  par sa mère, Louis fit donc pendant son enfance de nombreux séjours en Berry. Après son mariage avec Anne de la Grange en 1648,  Louis partagea son temps entre son hôtel particulier,  quai des Célestins, à Paris, et le château de l'Isle-Savary où naquit en 1651 leur fils François-Louis de Buade,  seul héritier de la famille.

Pendant la Fronde, Louis laissa sa femme courir le pays aux côtés de la Grande Mademoiselle, tandis qu’il se consacrait à l'exploitation de ses terres. Il reprit ensuite les armes avec le titre de maréchal de camp et vint combattre lesTurcs à la frontière de la Hongrie en 1644.

La situation financière des Frontenac, mauvaise depuis de nombreuses années, allait en s'aggravant, car ils menaient grand train et accumulaient les dettes. Une description de Mlle de Montpensier, qui vint à  l'Isle- Savary,  nous donne une idée des goûts et des dépenses des Frontenac :

“J'allai à l'ille [L'Isle-Savary] où est lamais on de Frontenac qui est assez jolie pour un homme comme lui.  Il m'y fit faire bonne chère. Il me montra tous les desseins qu'il avait d'embellir sa maison et d'y faire des jardins, des fontaines, des canaux. Il faudrait être surintendant pour les exécuter et à moins que de l'être je ne comprends pas qu'on les puisse concevoir. ”

Pourvenir à bout de ses dettes, le comte de Frontenac dut s'engager au service de la république de Venise. Il y acquit la gloire, en défendant la Crète, mais n'y fit pas fortune. Il fut donc en 1670question de saisir les châteaux de Palluau et de l'Isle-Savary pourdettes. C'est à ce moment que les seigneuries furent partagées entre les deux époux. Palluau fut mis sous séquestre, mais Mme de Frontenac put conserver l'Isle-Savary et en garder la propriété en l'absence de son mari, nommé gouverneur de la Nouvelle-France en avril 1672.

Cependant, la situation des Frontenac était telle que même les avantages pécuniaires de cette dernière nomination ne permettaient pas de renflouer leurs finances.  Grâce aux interventions répétées de Mme de Frontenac, Palluau ne fut vendu qu'après la mort de Frontenac. Quant à  l'Isle-Savary, elle en fit don à  son amie Madeleine Blondel d'Outrelaize,  pour échapper aux créanciers de son mari. Elle continua cependant à y demeurer lors de ses séjours dans leBerry. La famille s'éteignit avec elle - l'unique héritier des Frontenac, François-Louis, étant mort en 1672, durant la guerre de Hollande.

Entièrement construit en pierre de taille, le château a encore des allures médiévales, avec ses fenêtres à meneaux et ses tours à créneaux et mâchicoulis. L'édifice se compose d'un long corps de bâtiment rectangulaire flanqué à chaque angle de tours carrées massives. L'une de ces tours domine l'ensemble et tient lieu de donjon. Des actes de baptême de la famille Frontenac sont conservés à la mairie de Clion.

INDRE
Méobecq

L'abbaye de Méobecq, dont les documents les plus anciens font remonter la fondation au viième siècle,  date à  laquelle quelques religieux s'y installèrent pour vivre selon la règle de saint Benoît, fut dotée en1048 d'une église de pierre dédiée à saint Pierre. Durant tout le Moyen Âge, l'abbaye joua un rôle considérable dans la région où elle possédait terres, moulins, forêts et métairies, où elle administrait prieurés et paroisses et ou elle rendait justice comme une véritable seigneurie.

Les guerres de Religion portèrent un coup fatal au monastère, dévasté en 1569 par l'armée protestante de Condé qui se rendait de Bourgogne en Poitou. Après   une brève résurrection, vers le milieu du xviième siècle, l'abbaye fut une des premières à être supprimée pour avoir pris le parti de Saint-Cyran et des jansénistes.

A la même époque, en 1657, François de Laval était sacré évêque de Pétrée et nommé vicaire apostolique de la Nouvelle-France.  Son nouvel évêché  ne lui apportant aucun revenu, on lui attribua ceux de l'abbaye de Méobecq, ainsi que ceux de l’ abbaye de Bénévent,  en Limousin.

Les bâtiments conventuels de Méobecq,  alors en ruine, furent démolis. L'église abbatiale fut transformée en église paroissiale et l'abbaye ne fut plus qu'une propriété de rapport dont les revenus allaient chaque année subvenir aux besoins croissants des fondations canadiennes. Cette abbaye du fin fond de la Brenne contribua donc, jusqu'en 1710,  aux frais de l'évêché de Québec, et son démantèlement progressif servit au financement du Grand Séminaire de Québec.

INDRE
Palluau

Originaire de Guyenne, la branche Frontenac de la famille de Buade tire son nom de la seigneurie de Frontenas en Agenais.  LesFrontenac font leur entrée dans l'histoire avec Antoine de Buade de Frontenac, ami d'Henri IV, qui, devenu roi de France, le nomme capitaine du château de Saint-Germain-en-Laye.  Les enfants Frontenac sont ainsi les premiers compagnons de jeu de Louis XIII. En 1606, Antoine de Buade fait l'acquisition du château de Palluau qu'Henri IV érige en baronnie en 1607, et Louis XIII en comté en 1622.  Antoine de Buade meurt en 1626 et est inhumé à Palluau dans la crypte de l'égliseSaint-Sulpice,  ancienne collégiale Sainte-Menehould (xiième-xivème siècles,  choeur du xvième siècle),  qui renferme des trésors de diverses époques (stalles du xvème siècle, vitraux du xvième et statues de pierre polychromes). Son fils aîné, Henri de Buade, épouse Anne Phélypeaux de Pontchartrain en 1613. Il meurt avant son père en 1622. C’est sa veuve qui s'occupe de la gestion de l'héritage au nom de l'héritier du titre, Louis.

Louis de Buade, comte de Frontenac et de Palluau, est né à  Saint-Germain-en-Laye en 1622.  Son baptême est célébré le 16 juillet 1623 à Saint-Germain, alors que son père est déjà mort, en présence de Louis XIII, son parrain. Élevé par sa mère, Louis passe une partie de son enfance à Palluau. En 1634, après le décès de celle-ci, il rend foi et hommage au roi pour le comté de Palluau. À  17 ans, muni du grade de lieutenant, il fait ses premières armes. Bientôt capitaine, puis colonel au régiment de Normandie, il sert successivement en Flandres, en Allemagne et enItalie. Nommé maître de camp du régiment de Navarre, il est blessé  à Orbillo. À son retour en 1648, il épouse Anne de la Grange, fille d'un riche maître des requêtes, malgré l'opposition de la famille de la jeune fille qui finit par la déshériter.

Frontenac mène un train de vie considérable et est criblé de dettes. Pour faire face à ses difficultés financières grandissantes,  il reprend du service. En 1664, il repousse les Turcs à  la frontière de la Hongrie avec le régiment de Carignan-Salières.  En 1669, au service de la république de Venise,  il défend Candie et la Crète.

 La tour FÉODAL de château Frontenac à PALLUAU

 La tour FÉODAL de château Frontenac à PALLUAU

Malgré  ses efforts, Palluau et l'Isle-Savary sont menacés de saisie pour dettes en 1670.  Grâce à  ses puissantes recommandations et aux preuves qu'il a données de sa valeur militaire, Frontenac obtient alors le poste de gouverneur de la Nouvelle-France.  Nomination providentielle qui lui permet d'obtenir un sursis pour ses dettes et la levée provisoire de la saisie sur ses biens. Sa femme, restée à Paris, met dès lors son influence à son service et appuie sa cause à plusieurs reprises quand le besoin s'en fait sentir.

Frontenac débarque donc à Québec en septembre 1672. Marqué  par son administration autoritaire, ce premier séjour (1672-1682) apporte une certaine prospérité à la colonie, ainsi qu'un extraordinaire développement de l'espace canadien connu.  Il encourage l'exploration de l'Ohio, des GrandsLacs, de l'Illinois et enfin du Mississippi, patronne la fondation d'un fort au nord du lac Ontario et l'exploitation du territoire de la baie d'Hudson. Jean-Baptiste Franquelin, un cartographe de talent protégé de Frontenac, car il est son compatriote, est chargé de la transcription de ces découvertes.  Nous lui devons de magnifiques cartes qui traduisent bien l'enthousiasme des pionniers (elles peuvent être consultées à la Bibliothèque nationale de Paris ou aux Services historiques de la Marineau château de Vincennes). Jean-Baptiste Franquelin est né vers 1651. Le petit manoir de Villebernin, à trois kilomètres de Palluau, revendique le privilège d’être sa maison natale. Son acte de baptême est conservé aux archives départementales de Châteauroux,  mais l'église Saint-Michel où il fut baptisé  est aujourd'hui disparue.

En1675, Frontenac, qui avait jusqu'alors gouverné  seul, entre en conflit avec l'intendant Jacques Duchesneau, nouvellement nommé.  Par ailleurs, ses querelles s'intensifient avec Mgr de Lava let les Jésuites. En 1682, Frontenac et Jacques Duchesneau sont rappelés à Paris. Frontenac, qui n'a pas, contrairement à ce qu'on dit, fait fortune au Canada, est loin d'avoir remboursé toutes ses dettes.  Il ne peut donc empêcher la confirmation du séquestre sur sa seigneurie de Palluau.

Pendant ce temps, au Canada,  ses successeurs se voient dans l'incapacité de tenir à distance les Iroquois, de plus en plus exacerbés par les intrusions françaises dans leur territoire. Dès le début de la guerre entre la France et l'Angleterre,  les Iroquois attaquent la colonie. Ils massacrent la population de Lachine le 5 août 1689.

Louis XIV fait alors appel à l'expérience de Frontenac et lui confie,  à  nouveau le gouvernement de la Nouvelle-France. Arrivé à Québec en automne 1689, il soutient le siège de la ville et repousse les assaillants anglais en octobre 1690.  Par la suite, des interventions répétées, et particulièrement celle de 1696, viennent à bout des guerres iroquoises. Les Iroquois ne représenteront plus désormais de danger pour la colonie.

Le28novembre1698,  le comte de Frontenac meurt au château Saint-Louis de Québec à  l'âge de78 ans.  Ses obsèques ont lieu en l'église des Récollets qu'il avait toujours préférés aux Jésuites. Le château de Palluau, que ses créanciers n'avaient pas réussi à mettre en vente avant sa mort, est alors acquis par le duc de Saint-Aignan.

Palluau tire son nom d'une origine celtique et signifie “bouclier”.  Il fut d'abord oppidum romain, puis bastion primitif en bois. Du château féodal plusieurs fois détruit durant le Moyen Âge, il ne reste plus aujourd'hui qu'une tour massive datant du xiième siècle. Deux corps de logis perpendiculaires et flanqués de tours, sont ponctués de fenêtres à meneaux.  La porte du bâtiment principal date du xivème siècle. Château défensif, certes, mais gracieux, Palluau dresse vers le ciel ses multiples tourelles à toits pointus. À l'intérieur,  de monumentales cheminées gothiques, dont une qui arbore les armes des Buade, ornent les vastes pièces,  autrefois décorées par les tapisseries dont Louis XIV avait fait présent à Frontenac. Les murs de la chapelle sont quant à eux couverts de peintures du xviième siècle.

Le château de Palluau est fermé à la visite, mais dans la mairie de Palluau on peut voir des actes de baptême de la famille Frontenac, ainsi que son arbre généalogique complet. L’endroit  n’a pas non plus oublié Jean-Baptiste Franquelin. Une plaque en son honneur a été apposée sur la façade de l’Office de Tourisme.

INDRE-ET-LOIRE
Amboise La Pagode de Chanteloup

Quel voyageur excentrique, quel rêveur exalté est donc à l'origine de cette pagode qui surprend tellement les visiteurs ? Son propriétaire n'était autre que Choiseul, Secrétaire d’Etat desAffaires étrangères, puis de la guerre et de la marine de Louis XV de 1759 à 1770. Celui-ci avait en effet acquis en 1761 le château de Chanteloup, aujourd'hui détruit.

La Pagode de Chanteloup

La Pagode de Chanteloup

Après sa disgrâce en 1770, Choiseul voulut organiser sa propriété,  en la mettant au goût du jour pour accueillir les nombreux amis qui lui étaient restés fidèles. Lavogue était alors aux chinoiseries. Louis-Denis Le Camus, son architecte, construisit donc dans le parc cette pagode d'inspiration anglo-chinoise.

Choiseul était arrivé aux Affaires étrangères en 1759. Contrairement à son prédécesseur Nicolas-René Berryer qui avait dit en parlant du Canada : “On ne cherche pas à sauver les écuries quand le feu est dans la maison”,  Choiseul,  conseillé par Bougainville, envisageait de porter énergiquement secours à  la colonie. Pieux projet que l'état des forces navales ne permettait plus d'exécuter! Choiseul réorganisa la Marine, sortit la France du mauvais pas de la guerre de Sept Ans, mais il était trop tard pour le Canada.

Les relations de Choiseul avec le Canada ne furent pas pour autant terminées. Quelques années plus tard, à l’instar du roi et de la cour qui citaient en exemple l'héroïsme et le patriotisme des Acadiens et qui insistaient sur la nécessité de leur réinsertion rapide dans la société française,  Choiseul, comme un certain nombre de grands seigneurs, accueillit sur son domaine de Chanteloup des cultivateurs acadiens exilés

INDRE-ET-LOIRE
Argenson

Pierre de Voyer d'Argenson doit son nom à cette terre.  Au xviiième siècle fut édifiée la belle construction actuelle avec ses deux pavillons d'entrée, son vaste jardin,  aujourd'hui retourné à la culture, et son parc boisé. L'ensemble devait être imposant et charme encore par son harmonie.

Pierre de Voyer d'Argenson était destiné à la vie religieuse.  Il abandonne tôt ce projet, mais sa vie de célibataire pieux conserve un je-ne-sais-quoi d'ecclésiastique. En 1658, après des débuts brillants comme bailli de Touraine, il devient, à  32 ans,  gouverneur de la Nouvelle-France.  Hélas! la situation ne sera pas, comme il l'espérait un peu,  de tout repos! Le manque d'hommes, le manque de moyens et les rivalités commerciales ont fait de la colonie la proie des Iroquois.  Il ne reste plus qu'à affronter la situation avec courage, ce qu'il fait, s'attirant ainsi le soutien de Marie de l'Incarnation et la sympathie des colons. Il utilise au mieux les minces ressources qui lui sont octroyées, réorganise la défense de Québec et rassure les habitants en appliquant de sévères mesures de surveillance et en accélérant les moyens d'intervention militaire.

MaisPierre de Voyer d'Argenson désire avant tout la paix. Il estime - vision utopique pour son époque - que le Canada peut se passer de soldats qu'il juge un poids supplémentaire pour la société et que seul un nombre accru d'agriculteurs pourrait repousser peu à peu les Iroquois,  par l’expansion des terres cultivées.

C’est pourtant l’inverse qui se produisit quelques années plus tard.  Les soldats du régiment de Carignan-Salières après avoir vaincu lesIroquois, s'installèrent au Canada et retrouvèrent leur vocation d'agriculteurs.

INDRE-ET-LOIRE
Azay-sur-Cher , Château de Leugny

Une jolie route le long du Cher invite à découvrir Leugny! Construit entre 1770 et 1779 par Jacques Portier, un élève de Gabriel, le château charme par la pureté et la sobriété  de ses lignes. On imagine facilement l'attrait qu'un tel bâtiment, tout de calme et d'harmonie, put avoir sur un homme fatigué et déçu comme l'était Louis Juchereau de Saint-Denis, lorsqu'il décida de quitter définitivement le Canada devenu anglais. Sans doute rêvait-il quelquefois, en contemplant les jardins à la française de ce château qu'il avait acquis vers 1785, à l'étrange chemin parcouru depuis l'époque où son ancêtre avait quitté sa chaumière du Perche, quelque 150 ans plus tôt! 

INDRE-ET-LOIRE
Beaumont-en-Véron

La petite ville de Beaumont-en-Véron recouvre le territoire occupé autrefois par les chasses royales de Véron et les terres de Razilly. De cette époque subsistent les deux châteaux de la famille de Razilly : Razilly et Vélors.

Razilly (en cours de restauration, peut se visiter) :

Les Razilly, famille de grande noblesse tourangelle, possèdent ce château depuis des temps très reculés. La légende veut que Charlemagne lui-même y ait été reçu. Toujours est-il que les rois de France, Charles VII (1422-1461), Louis XI (1461-1483) et CharlesVIII(1483-1498) montrent une certaine prédilection pour ce château proche de leurs terrains de chasse.  Ils s'y sentent même si bien qu'ils y font faire des embellissements, agrandissent la chapelle et donnent peu à peu aux bâtiments leur aspect actuel (mis à part la façade sur le jardin qui est du xviième siècle, et une partie du corps de logis, qui date du xviiième siècle).  C'est ce château situé au milieu des champs et surveillé par son pigeonnier bon enfant que connaîtra Isaac de Razilly, premier gouverneur de l'Acadie. Les bâtiments tiennent à la fois de la ferme, de la maison forte et du manoir de plaisance.

Isaac de Razilly est né à quelques kilomètres de là,  dans laVienne, au château des Eaux-Melles. Comme c'est la tradition dans sa famille, il devient, à 18 ans,  chevalier de l'Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem et entre dans la Marine. Soldat plein de vaillance et voyageur inlassable, il se forge une solide réputation qui incite finalement son illustre parent, Richelieu,  à  lui confier une mission de confiance: exposer,  d'après son expérience, ses idées sur le commerce intérieur et extérieur de la France.

Le Château de Velors

Le Château de Velors

Son mémoire déposé en 1625 - un modèle de clarté -  insiste sur l'importance des colonies dans l'économie française et sur la nécessité de créer une grande compagnie de commerce et de peuplement au Canada.  C’est ainsi que la Compagnie des Cent-Associés va naître. Mais ce n'est qu'après le traité de Saint-Germain-en-Laye,  signé en 1632,  que Razilly pourra commencer la mise en valeur du territoire acadien.

Vélors (aujourd’hui transformé en foyer pour jeunes handicapés)

Ce n'est certes pas ainsi que l’on imagine le logis d'un ancien marin, fût-il noble et riche!  Avec sa tourelle à  toit pointu et son appareillage en damiers de briques et de pierres, ce petit manoir Renaissance évoquerait bien plutôt la vie gaie et raffinée de quelque jeune femme poétique.   Poétique comme l'était peut-être Henriette de Joyeuse, femme du duc de Guise, à qui Claude de Rasilly acheta Vélors en 1627.

Lefrère d'Isaac de Razilly était-il, comme nous,  charmé parsagracieuse demeure ? Toujours est-il qu'il n'envisagea jamais de l'abandonner pour prendre la succession de son frère enAcadie.  Préférant régler ses affaires de chez lui,  il délégua ses pouvoirs à son cousin, Charles de Menou d'Aulnay,  qui était déjà  sur place, et s'occupa, pour sa part, de réunir un nouveau contingent de colons. C'est ainsi qu'en 1636, il poursuivit la politique de son frère en envoyant au Canada sur le Saint-Jehandes cultivateurs et des artisans recrutés aux alentours de Chinon, Bourgueil et même à Dijon.

Il oeuvra à distance pour la colonie jusqu’en 1642, date à laquelle il passa complètement ses pouvoirs à Menou.

INDRE-ET-LOIRE
Charnizay

Dominant la jolie petite vallée de l'Aigronne dont la route épouse les boucles capricieuses, le village de Charnizay est resté groupé autour de l'église du xvème siècle. Ce fief fut pendant des siècles la propriété des Menou.

Charles de Menou, seigneur d'Aulnay, y naît en 1604 dans le château familial, aujourd'hui disparu (seul le donjon subsiste).  Il sert d'abord dans la Marine comme lieutenant de son cousin Isaac de Razilly ; puis, quand celui-ci est nommé gouverneur de l'Acadie, il le suit et devient son plus fidèle collaborateur.

Malheureusement, la mort d'Isaac cristallise la mésentente entre Charles de Menou d’Aulnay et Charles de Saint-Etienne de La Tour, également lieutenant du gouverneur,  entamant un processus de querelles qui ruinera les deux antagonistes et dont les historiens se feront l'écho.

Notons néanmoins à l'actif de Charles de  Menou d’Aulnay, un souci constant de l'organisation, de la défense et du peuplement de la colonie, qui fait de lui un des artisans du premier peuplement européen des provinces maritimes du Canada. Par une ironie du sort, le pauvre Charles de Menou d’Aulnay n'a jamais eu la consécration qu'il méritait ; oublié par l'histoire,  il le fut aussi par sa femme qui s'empressa après sa mort d'épouser son grand rival, Charles de Saint-Etienne de La Tour!

Une plaque en l’honneur de Charles de Menou d’Aulnay a été posée en 2001 sur la façade de l’église de Charnizay.

INDRE-ET-LOIRE
Chinon

vue d'ensemble de CHINON

vue d'ensemble de CHINON

Les ruines de cette redoutable place de guerre juchée sur un plateau rocheux dominent la Vienne. Elles évoquent les temps difficiles de la guerre de Cent-Ans et les luttes qui opposèrent le royaume de France à celui d'Angleterre, allié du duché de Bourgogne.

LeDauphin, futur Charles VII, après avoir fui Paris une nuit de 1418, occupa tour à tour les forteresses de Loches et de Chinon dans son exil sur ses terres de Touraine. C'est là, dans la grande salle du château de Chinon, que Jeanne d'Arc vint le trouver et qu'elle le reconnut parmi ses courtisans.

En contre bas du château, les vieilles rues de la coquette petite ville,  restaurée avec délicatesse, vous conduiront de l'église Saint-Étienne, bel ensemble du xvème siècle, où  furent baptisés les ancêtres des Brindamour et des Gatineau,  à  la maison de Rabelais, au 15 rue de la Lamproie, ou tout bonnement au   petit   café   du   coin.  Là,  accompagnant   la   fouace traditionnelle,  l'insolent petit vin de Chinon vous fera saisir mieux qu'un guide l'âme et les nuances du pays que quitta Michel Gallant en 1636 pour gagner l'Acadie à  bord du Saint-Jehan. Des nombreux Chinonais qui participaient au voyage, lui seul, semble-t-il, s'est décidé  à s'installer définitivement sur les terres du Nouveau Monde qui accueillit cependant, au xviiième siècle, Jean Gatineau dit Brindamour, dont le mariage fut célébré à Saint-Ours en 1759.

INDRE-ET-LOIRE
Le Grand-Pressigny

ClaudeTrouvé  est né vers 1644.  On ne possède aucun document sur son enfance et sa jeunesse. Il entra à Saint-Sulpice à l'âge de 21 ans et y resta 2 ans. Il fut emmené  à Montréal en 1667 par Gabriel de Queylus, en compagnie de l'abbé François de Salignac de La Mothe-Fénelon. Ordonnés prêtres à Québec en 1668, les deux jeunes gens se virent chargés du camp volant de Kenté  dont l'abbé Trouvé fut nommé supérieur. En 1669, un troisième Sulpicien se joignait à eux: François-Saturnin Lascaris d'Urfé. Pendant 12 ans, Claude Trouvé  et ses compagnons oeuvrèrent sur les bords du lac Ontario à partir de trois centres de mission, mais sans résultats appréciables. Aussi, en 1680, le père Tronson, supérieur du séminaire deSaint-Sulpice,  leur demanda-t-il de sacrifier cette oeuvre et de rejoindre le village amérindien de « la Montagne », au-dessus de Ville-Marie,  dans l'île de Montréal.  Claude Trouvé ne put rester qu'un an en poste. À l'automne 1681, il était rappelé en France par son vieux père infirme et réduit à la pauvreté. Pourvu d'un confortable bénéfice dans sa région d'origine,  il devient curé du Grand-Pressigny de 1683 à 1687 et membre du chapitre de la Collégiale qui y avait été fondée en 1552.  La vie canoniale au Grand-Pressigny ne devait pas manquer de charme mais, en 1685, le père Tronson lança un appel à Claude Trouvé. Mgr de Saint-Vallier, nommé par le roi coadjuteur de Mgr de Laval, partait pour le Nouveau-Monde et cherchait un compagnon. Le nouvel évêque s'engageait à payer les dettes de la famille Trouvé.  Lecuré du Grand-Pressigny se laissa persuader et prit la mer avec le jeune évêque.  En 18 mois,  il parcourut avec lui toutes les paroisses le long du fleuve entre Québec et Montréal, puis les rivières et les lacs intérieurs et,  pour finir, toute l'Acadie. Une expédition incroyable, commencée avant la fonte des glaces. Partout, les missionnaires catéchisaient. En 1687, Mgr de Saint-Vallier revint en France avec Claude Trouvé.

Le père Tronson lui confia alors la mission d'établir en Acadie un séminaire de prêtres de Saint-Sulpice. Il résilia sa cure de Grand-Pressigny et, dès 1688 gagna Port-Royal,  en Acadie.  Il eut alors à faire face à de nombreuses difficultés,  puis fut fait prisonnier par les Anglais durant l'attaque de Port-Royal. Retenu à bord du navire de Phips, pendant le siège de Québec en 1690, il fut échangé contre un prisonnier anglais au terme du siège.  Après quatre nouvelles années passées à Québec, il demanda, en 1696, son renvoi à Beaubassin, en Acadie. En 1704, les Acadiens de la baie Française furent victimes d'expéditions punitives des Bostoniens. À l'approche des voiles ennemies, les familles de colons s'enfuyaient dans la forêt, emmenant leur bétail avec eux.  Claude Trouvé mourut d'épuisement à la fin de cette année-là. Il était âgé de 60 ans.

 Le Grand-Pressigny mérite une halte particulière. Le château, bâti au confluent de l'Aigronne et de la Claise sur un site néolithique célèbre, est de fondations fort anciennes. Pendant la guerre deCentAns, Pressigny devint l'une des plus redoutables places fortes de Touraine. En1418, alors que le duc de Bourgogne l'occupait, Charles VII en fit le siège.

Vers 1550,  Honorat de Savoie, marquis de Villars, transforma la forteresse en château confortable et plaisant. Il conserva cependant la porte et les deux tours crénelées du xiiième siècle, le donjon, les remparts et les douves. La ville se niche au pied des remparts, avec son église du xiiième siècle dont l'abbé Trouvé fut curé et ses petites rues aux noms évocateurs (rue du Four-Banal,  rue des Remparts). Pressigny est aujourd'hui connu dans le monde entier pour ses richesses préhistoriques. Il y a en effet plus de 500 000 ans, l'homme préhistorique s'installa dans la région pour se livrer à une véritable industrie du silex blond taillé dont on retrouve des exemplaires dans toute l'Europe. En1912,  un musée de la préhistoire fut fondé par le docteur Chaumier. Plus de 10 000 pièces sont aujourd'hui exposées dans le château-musée du Grand-Pressigny.

INDRE-ET-LOIRE
Mouzay

Rien ne subsiste de l'ancien château où Pierre de Voyer d'Argenson finit ses jours, songeant peut-être aux démêlés qui l'opposèrent à l'évêque de Québec, Mgr de Laval.

Les frictions étaient inévitables entre ces deux hommes de caractère et d'autorité dont les fonctions se chevauchaient souvent. Il est à noter que Pierre de Voyer d'Argenson, en bon courtisan, n'appréciait guère la politique des Jésuites, contrairement à Mgr de Laval.

L'église des xvème - xvième siècles, gracieuse avec son mince et haut clocher d'ardoise, abrite l'épitaphe du cinquième gouverneur de la Nouvelle-France, mort en 1709.

INDRE-ET-LOIRE
Paulmy

Avec les Voyer d'Argenson de Paulmy, nous entrons de plain-pieddans un véritable roman de cape et d'épée. Leurs propriétés éparpillées dans un rayon de 30 kilomètres autour de Paulmy (Argenson, Mouzay, La Guerche), attestent l'importance de ces seigneurs tourangeaux qui traversèrent l'histoire le sabre à la main.

Malgré tout, le château du Châtellier, à deux kilomètres à peine de Paulmy, leur résista longtemps. Solidement perché  sur un rocher calcaire,  il abritait l'un des derniers bastions protestants en Touraine, injure à la face des d'Argenson, farouches catholiques qui assiégèrent inlassablement la redoutable place forte tout au long des guerres de Religion.

Par la suite,  la victoire du parti catholique accélère l'ascension de cette famille. Au vieux donjon du xvème siècle sont alors accolées toutes sortes de constructions,   et l'immense terre de Paulmy devient une des plus belles seigneuries du royaume. Les communs actuels sont du xviième siècle,  tandis que le bâtiment principal a été plusieurs fois modifié au cours du xviiième siècle. Pierre de Voyer d'Argenson, qui fut gouverneur de la Nouvelle-France de 1658 à  1661,  appartenait à une branche cadette de cette famille, tandis que René-Louis,  ministre de la Guerre sous Louis XV,  était issu, lui, de la branche aînée de Paulmy. Son intervention, de 1743 à 1747, ne fut pas très heureuse pour les affaires canadiennes. En effet, le très anglophile ministre méconnaissait l'importance du Canada et n'hésitait pas à affirmer : “Nous avons des colonies que je troquerais contre une épingle, si j'étais le roi de France”.  C’est néanmoins à lui que nous devons l'envoi du marquis de Montcalm au Canada.

INDRE-ET-LOIRE
Richelieu

Du château du cardinal de Richelieu, bâti sur les plans de Lemercier, architecte favori du ministre de Louis XIII, il ne reste plus aujourd'hui que le pavillon d'entrée, l'orangerie, les caves et une partie des communs. Le parc est cependant visitable.

le parc de l'ancien château

le parc de l'ancien château

Le château, dont les gravures du temps font entrevoir toute l'ampleur, a été détruit, et les fameuses collections de Richelieu ont été dispersées. Au Musée de la Marine de Paris ont échoué les colonnes rostrales (colonnes ornées d'éperons de navires) qui, au portail principal de la cour d'honneur, symbolisaient les victoires navales du grand amiral. Car Richelieu avait tenu à créer une flotte puissante, tant pour la guerre que pour le développement du commerce extérieur.  En cela, sa politique canadienne était en accord avec les grandes lignes du rapport qu'Isaac de Razilly lui avait rendu en 1626. Dans son mémoire, le futur gouverneur de l'Acadie faisait valoir point par point le prestige politique et commercial d'une France dotée d'une marine plus importante et mieux organisée et de colonies mieux exploitées parce que plus peuplées.

Isaac de Razilly avait vu juste : Vite convaincu, Richelieu posa   les bases de la Compagnie des Cent-Associés dont l'originalité  était de faire passer l'élément   mercantile derrière la colonisation et l'évangélisation, dans le cadre d'une politique coloniale à plus long terme.

L'influx vital étant ainsi donné, la cour s’enthousiasma : laNouvelle-France dont rêvaient Champlain et Razilly allait enfin pouvoir commencer à exister. La ville de Richelieu,  qui était directement attenante au château, demeure un très bel exemple de l'architecture Louis XIII. Elle fut élevée de toutes pièces à partir de 1631, suivant la volonté du ministre, qui désirait y établir sa propre cour. À l'intérieur d'un rectangle entouré  de fossés et fermé de portes, les rues se coupent d'équerre et tracent un plan en damier. A chaque extrémité du rectangle,  se répondent deux places symétriques, sur lesquelles donnent les halles, l'église et les boutiques.

Le cardinal disparu, la ville fut vite désertée par ses courtisans. Nous la retrouvons aujourd'hui avec ses maisons bien alignées et ses places semblables, comme le décor insolite d'une pièce de théâtre depuis longtemps terminée.

INDRE-ET-LOIRE
Seuilly, la Devinière

Escale en monde rabelaisien. Cette maison des champs d'un bon bourgeois tourangeau, avec ses grosses cheminées, ses lits à quenouille et son escalier à auvent est aussi une escale dans le temps. Nous abordons un xvième siècle bien vivant, puisque la maison,  entièrement  meublée,  s'efforce d'évoquer par de nombreuses illustrations la vie quotidienne de son fameux propriétaire. Ne manquez pas l'inscription “ 8 aprilis 1509 ” à la fenêtre de la chambre d'enfant, peut-être gravée par Rabelais lui-même lorsqu'il avait quinze ans.

Rabelais, comme tous les esprits cultivés de son temps, était parfaitement au courant des expéditions lointaines qui poussaient les navigateurs à la recherche d'une voie vers les Indes et la Chine. Lorsqu'en 1548, il écrit les Voyages de Pantagruel, dans le Quart Livre, tout le monde se passionne encore pour les récentes découvertes de Jacques Cartier (1534-1542) et ce sont les voyages de ce dernier qui inspirent à Rabelais les « fabuleuses navigations » du fils de Gargantua à la recherche de la « Dive Bouteille ».

Pantagruel s'embarque à “Thalasse” (Talard,  port de Saint-Malo) avec un “pilote de Sammalo” (Jacques Cartier était de Saint-Malo)  et un “pilote de Lanternois” (Alphonse de Saintonge, de La Rochelle). Comme Jacques Cartier, il se dirige vers l'Amérique du Nord espérant y trouver un passage occidental plus rapide vers la Chine. Il passe la baie des Châteaux qu'il appelle “Médamothi”, l'île des Démons qu'il appelle île des“Macréons”. Enfin, son bateau remonte le Saguenay,  car son pilote,  comme Jacques Cartier, estime trouver par là la fameuse route vers Cathay (la Chine) mais Pantagruel sera plus chanceux que Jacques Cartier,  puisqu'il trouvera, lui, la “Dive Bouteille ”, Cathay et la célébrité !

INDRE-ET-LOIRE
Tours (jumelage avec Trois-Rivières)

À  Tours,  nous sommes vraiment au coeur du jardin de la France.  Ici semble se concentrer l'esprit du Val de Loire, puisque Tours, centre géographique, administratif et intellectuel de la région, est aussi la ville de Marie Guyart, dite de l’Incarnation.

La vieille ville a grandi autour de deux pôles, la cité administrative et religieuse et la cité marchande. Sur l’emplacement de l’ancienne ville gallo-romaine, la cité administrative et religieuse est groupée derrière ses remparts entourant la cathédrale et le château. Là, les rues sont tortueuses et pavées, s'incurvent selon le tracé  de la muraille aujourd’hui disparue. Vient ensuite le faubourg qui entoure l’ancienne église deSaint-Pierre-des-Corps devenue aujourd’hui Saint-Pierre-Ville. À  l'ouest, sur l'emplacement d'anciens couvents dont les activités spirituelles ont bientôt cédé le pas à  un temporel plus lucratif, se trouve la cité marchande. Ses maisons des xivème et xvème siècles,  avec leurs croisillons de bois et leurs sculptures, évoquent un passé prospère.

Marie Guyart, née en 1599, habitait ce quartier commerçant et animé. Son père, Florent Guyart,  était boulanger dans la grand-rue (l’actuelle rue Colbert)  d'où  sa maison a malheureusement disparu ainsi que la plupart de celles de son époque.  Mais une visite à la place Plumereau ou à  la rue Briçonnet fera aisément faire à notre imagination ce voyage dans le temps.

Ce n'est pourtant pas le vrai quartier de Marie de l'Incarnation,  puisque ses parents le quittent lorsqu'elle a 15 ans pour s'installer dans le faubourg derrière la cathèdrale. Saint-Pierre-Ville, bâtie au XIème siècle puis remodelée aux xvème et xvième siècles, devient l’église de sa paroisse. Elle y épouse Claude Martin, négociant en soie, et y fait baptiser son fils, Claude.  Après la mort de son mari, elle reste à Saint-Pierre-Ville et commence à  travailler pour son beau-frère, Paul Buisson,  qui s'occupait d'une importante entreprise de transports commerciaux par voie d'eau. Les locaux étaient établis rue Mirabeau et l'on pense que le portail du numéro 27 est peut-être un vestige de la maison Buisson.

Après plusieurs années assez dures qu'elle considère comme un apostolat, Marie devient la collaboratrice très efficace de son beau-frère.  Celui-ci accepte donc d'autant moins sa décision d'entrer au couvent. Son fils de douze ans est désespéré,  mais elle ne renonce pas à son projet qui,  dit-elle,  lui est inspiré par Dieu.

La Place Plumereau

La Place Plumereau

Elle entre donc au couvent que les Ursulines viennent de créer tout près de sa paroisse, au coin de la rue desPetits- Préset de l'actuelle rue des Ursulines, dans les locaux d'un charmant hôtel particulier du xvième siècle, l'hôtel de la Petite Bourdaisière.  Les Ursulines y demeurèrent jusqu'à l'édification de leur couvent (l’actuel lycée Francis Poulenc,  rue des Ursulines).  Marie fait sa profession de foi dans la petite chapelle Saint-Michel qui est accolée aux bâtiments. La chapelle Saint-Michel existe toujours et abrite le Centre Marie de l’Incarnation, qui s’étend également dans l’Hôtel de la Petite-Bourdaisière. Ce centre, qui est un musée consacré à la vie de Marie de l’Incarnation, propose aussi des visites de Tours sur les traces de Marie de l’Incarnation.

A la suite de la lecture des Relations des Jésuites et d’une sorte de rêve prémonitoire, Marie prit la décision de partir au Canada. Ce souhait lui causa d'abord bien des soucis.  On la traita d'illuminée, mais, une riche jeune femme arriva à  point pour tout arranger. Madame de La Peltrie, personnage romanesque s'il en fut,  s'était enthousiasmée pour la cause canadienne,  à  la lecture des Relations des Jésuites du Canada. On avait besoin là-bas d'un couvent de religieuses enseignantes, sans avoir les moyens de l'obtenir: qu'à cela ne tienne,  elle serait la providence, une providence qui avait un petit goût marqué pour l'aventure.

L'entente se fit très vite entre les deux femmes (la « présentation » s'était faite en rêve de part et d'autre,  ce qui avançait bien les choses). Elles se rendirent ensemble au Palais épiscopal, l'actuel Musée des Beaux-Arts de Tours, à côté  de la cathédrale, où elles n'eurent aucun mal à convaincre le prélat qui avait, lui aussi, des sympathies missionnaires.  Il   ne faut pas oublier que ce début du xviième siècle est en France une périodetrès mystique où l'on se passionne pour la propagation de la foi. Mme de la Peltrie et Marie del'Incarnation quittent donc Tours pour Québec. Elles vont y fonder, en 1639, le couvent des Ursulines qui prendra désormais en main l'éducation des filles de la colonie et des jeunes autochtones.

Si Marie s'est retournée une dernière fois, en quittant Tours,  c'est sûrement pour contempler les tours échevelées de la cathédrale Saint-Gatien. Cette cathédrale,  construite en quatre siècles, présente un éventail complet de la culture et de l’art   religieux du xiième siècle à  la Renaissance : manifestation de la foi qu'elle allait contribuer à implanter au Canada.

La maison de ville de Marie de l'Incarnation est difficilement localisable, mais la maison de campagne des Buisson , la “Charpraie ”, à Chambray,  petite demeure campagnarde à tour ronde, existe toujours.   Marie de l'Incarnation y venait fréquemment avec sa soeur et son beau-frère prendre quelques jours de repos.

Les relations suivies qu’entretinrent les deux couvents d’Ursulines, de part et d’autre de l’Atlantique sont sans doute à l’origine de la décision que prirent Noël Chartrain, Pierre Normandin dit Sauvage, Timothée Provost et Charles Neveu de s’établir au Canada entre 1665 et 1728.

LOIRET
Châteaudun

Châteaudun appartint à la famille d'Orléans-Longueville du xiiième aux viième siècle. L'un de ses membres a particulièrement marqué la ville et le château de sa personnalité: le beau Dunois,  bâtard d'Orléans et compagnon de Jeanne d'Arc.  Ilfit raser l'ancienne forteresse, à l'exception de l'imposant donjon du xiième siècle et des sous-sols. Puis, il fit élever la Sainte-Chapelle,  bel exemple de la dernière période ogivale,  qui renferme de magnifiques statues polychromes,  ainsi qu'un “jugement dernier” du xvème siècle. On lui doit également une aile du château de tradition encore gothique (l'aile de Dunois), , alors que la seconde aile, construite au xvième siècle parFrançois d'Orléans-Longueville, est caractéristique de la première Renaissance française. Au pied du château, la rue du Château, bordée de maisons à encorbellement, et la rue de la Cuirasserie, où l'on verra d'anciennes maisons à tourelles et à pans de bois, conduisent à l'église de la Madeleine.

L'église de la Madeleine remonte au xiième siècle. Remaniée postérieurement,  elle conserve cependant de nombreux vestiges du xiième siècle, dont la crypte et le portail sud. Elle a malheureusement été  endommagée par un bombardement aérien durant la Deuxième Guerre mondiale. Aux viième siècle, la Madeleine était une abbaye en commande. Jacques de la Ferté, qui résidait ordinairement à la cour du roi comme pré-chantre, en fut nommé  abbé  en1624. Membre de la Compagnie des Cent-Associés,  il acquit en Nouvelle-France des parcelles de terre qu'il devait par la suite céder auxJésuites. L'une de ces terres était situéeà l'emplacement de l'actuel Cap-de-la-Madeleine. Il autorisa la construction à cet endroit, à la condition qu'on lui conserva le nom de son “ bénéfice” de Châteaudun, « la Madeleine », qui donna ainsi son nom au Cap-de-la-Madeleine. Le square Cap-de-la-Madeleine situé devant l’église de la Madeleine, rappelle aujourd’hui le lien entre les deux villes.

Le colon, Jean Lescarbot dit Beauceron, qui s’est marié avec Anne Baudouin en 1665 à Pointe-aux-Trembles est né à Châteaudun.   

LOIRET
Orléans

Située à la limite du Val de Loire et de l'Île-de-France, Orléans doit sa prospérité à sa situation et à son pont enjambant la Loire qui en ont fait de tout temps une ville de passage au commerce très actif. Ville bourgeoise et marchande,  Orléans entre dans l'épopée durant la guerre de Cent Ans. Le 12 octobre 1428,   Anglais et Bourguignons,  tenus en échec par les Orléanais, commencent le siège de la cité. Ce siège va durer six mois au cours desquels les assiégés multiplient ruses et plaisanteries,  aujourd'hui légendaires, pour déconcerter les assaillants. En avril, alors que le moral des défenseurs est au plus bas, l'arrivée de Jeanne d'Arc, accueillie triomphalement par la population et par les soldats, redonne du courageaux Orléanais.  Malgré  l'opposition des chefs militaires,  Jeanne devient la grande animatrice de la défense d'Orléans.  Les sorties et les assauts se multiplient et,  en moins de 15 jours, la Pucelle, quoique blessée au cours d'une attaque, sème avec ses troupes enthousiastes la panique dans  le camp adverse. Le 8 mai, les assiégeants se retirent, laissant matériel, vivres et malades. C'est la victoire ! Cette délivrance, célébrée chaque année en grande pompe les 7 et8 mai,  est l'un des grands jours de la ville d'Orléans qui vit encore aujourd'hui à l'heure de la Pucelle.  Cité  deJeanne d'Arc,  elle compte un lycée et d'innombrables statues,  places, rues et maisons à son nom.

Telle est la ville où est né, en 1607, Isaac Jogues, saint et martyr canadien issu d'une famille bourgeoise qui comptait des avocats, des apothicaires, des notaires et des marchands.

En1617,  il entre au collège des Jésuites qui venait d'être fondé  à  Orléans,  à l'emplacement de l'actuel collège Anatole Bailly, rue Jeanne-d'Arc. En 1624, il est le premier Jésuite orléanais à entrer au noviciat de Rouen. Désirant devenir missionnaire,  il poursuit ses études au collège de La Flèche, alors tout imprégné d'esprit missionnaire.

En avril 1636, il s'embarque pour la Nouvelle-France.  Il va passer quatre années très éprouvantes chez les Hurons, participant à la construction du fort Sainte-Marie,  puis à l'évangélisation des tribus amérindiennes de l'Ouest jusqu'au sault Sainte-Marie. En 1642, alors qu'il raccompagne un convoi à Ville-Marie (Montréal), il est fait prisonnier par les Iroquois avec les pères Goupil et Couture. Torturé par les Iroquois, il assiste à la mort de ses compagnons et ne réussit à s'échapper que par miracle, grâce à l'intervention des Hollandais qui le ramènent en Europe.  Rapatrié en France, le martyr fait l'objet d'une véritable dévotion et alimente la curiosité de tous. La régente Anne d'Autriche demande à le voir et lui baise les mains.

En1644,  malgré  son appréhension,  il demande à  ses supérieurs la permission de se consacrer à l'évangélisation des Iroquois.  Il est nommé ambassadeur de la paix auprès des Agniers chez qui il sera tué à coups de hache en octobre 1646. On peut évoquer le courage de ce fils de riches bourgeois dans l'église Notre-Dame-de-Recouvrance (xvième siècle), sa paroisse , où figurent encore les armes de la famille Jogues de Guédreville, anoblie au xviiième siècle. Ce tragique épisode ne découragea pourtant pas trois fils du pays qui allèrent tenter leur chance au Canada à la fin du xviième siècle et y fondèrent une nombreuse famille: Pierre Fontaine dit Bienvenu,  Jean Fauconnet dit Lafleur et François Lemoine dit Jasmin.

Une rue d’Orléans porte le nom d’Isaac Jogues

Orléans est également la ville natale de François de Beauharnais, intendant de la Nouvelle-France de 1702 à 1705, et deCharles de Beauharnais, gouverneur de la Nouvelle-France de 1726 à 1747. Tous deux étaient parents de Louis Phélypeaux de Pontchartrain, secrétaire d'État à la Marine et aux Colonies à partir de 1690..

LOIRE-ET-CHER
Blois

Après avoir été  la demeure du poète Charles d'Orléans, Blois entre dans la famille royale avec l'accession de son fils Louis au trône de France, sous le nom de LouisXII.  Devenu résidence royale,  Blois va jouer aux vième siècle un rôle comparable à celui de Versailles au siècle suivant.  Les rois s'y installent avec leur cour, font embellir le château et leur présence donne à la ville des allures de capitale.

Le château de Blois reste le vivant témoignage d'une époque extrêmement brillante. Flanqué de l'aile Louis XII de la dernière période du gothique flamboyant, le bâtiment central, construit sous François Ier, allie la mode italienne à  la fantaisie française. Son magnifique escalier d'apparat,  pris dans une tour octogonale dont les balustres forment tribunes, est l'une des oeuvres les plus marquantes de la Renaissance française. L'aileGastond'Orléans,  quiponctue   l'autre extrémité du bâtiment, fut élevée par Mansart au xviième siècle.

L'une des salles de réunion abrite un portrait de Charles de Beauharnais, né à Orléans,  gouverneur de la Nouvelle-France de 1726 à 1747. Au pied du château, Blois conserve de nombreux souvenirs de son époque royale, bien que la ville ait été fort endommagée par les bombardements de 1940. Ce sont les hôtels de la Chancellerie (ruePardessus),  de Jassaud (5, rue de la Fontaine-des-Élus), l'hôtel de Guise et plusieurs hôtels des rues Puits-Châtelet des Papegaults, ainsi que l'église Saint-Nicolas (la plus ancienne église de Blois) et la fontaine Louis XII.

Maison natale de l'Intendant Bégon

Maison natale de l'Intendant Bégon

Mais n'oublions pas l'hôtel d'Alluye, au 8, rue Saint-Honoré. Cebel hôtel particulier fut construit en 1508 pour Florimond Robertet,  trésorier de Louis XII et de François Ier. Derrière une façade de brique et de pierre, il abrite une vaste cour ornée d'une galerie à l'italienne et de médaillons représentant les12César. On remarquera également un escalier de pierre à vis, avec sa voûte en palmier. C'est dans cet hôtel racheté par sa famille que naquit le 21 mars1667 Michel Bégon, futur intendant du Canada. Une plaque sur la façade de l’hôtel le rappelle à la mémoire. Son père,  cousin de Colbert,   fut nommé  intendant à  Saint-Domingue,   puis   à Marseille,  avant de devenir l'un des plus célèbres intendants deRochefort.  Michel fut baptisé à  l'église Saint-Solenne (l’actuelle cathédrale Saint-Louis)  qui,  endommagée par   un ouragan,  venait d'être reconstruite dans le style gothique, grâce à l'intervention de Colbert . La femme de Colbert, dont la mère était une Bégon, était en effet blésoise et le mariage de Colbert avait été célébré à Saint-Solenne.

Michel Bégon était l'aîné de huit enfants. Une de ses sœurs épousa Michel Barrin, marquis deLa Galissonnière qui fut gouverneur de la Nouvelle-France par intérim de 1747 à 1749. Michel Bégon entra dans la Marine,  suivant la tradition familiale,  tout en poursuivant des études de droit. Il fut tour à tour conseiller du parlement de Metzet inspecteur général des provinces d'Aunis et Saintonge qui étaient sans cesse en liaison avec le Canada, par le port de Rochefort.

C'est ainsi qu'il se trouva en bonne position pour être nommé, en 1710, intendant de la Nouvelle-France. Il gagna donc le Canada en compagnie de sa femme, Jeanne-Élisabeth de Beauharnais, soeur de François, ancien intendant de la Nouvelle-France, et de Charles, futur gouverneur. Cette union des familles Bégon et Beauharnais a constitué un véritable pouvoir en Nouvelle-France où elles furent présentes dans l 'administration pendant près de 40 années consécutives. MichelBégonest l'un des intendants les pluspopulairesde l'histoire du Canada. Malgré les spéculations financières pour lesquelles il fut à plusieurs reprises près d'être compromis, l'argent   qu'il   investit   dans   la   colonie,   tant dans les divertissements pour la haute société canadienne que dans la création de scieries et de tanneries, lui acquit la réputation d'un homme généreux et entreprenant. Il fut effectivement le plus prodigue des six intendants qu'ait connus la Nouvelle-France. Ses théories sur la liberté du commerce, sur l'industrialisation et le peuplement de la colonie qui, à  son avis, ne pouvait subsister en dépendant entièrement de la métropole, sont celles d'un esprit éclairé. Pour intensifier le peuplement, il demanda la venue de soldats. Ces derniers n'étant pas disposés à  travailler hors des fermes,  dans l'industrie de base qu'il voulait développer, il alla jusqu'à  envisager la venue massive d'esclaves noirs dans la colonie pour y constituer une sorte de main-d’oeuvre permanente.

Cette proposition radicale ne fut heureusement pas retenue par la cour. Plus tard, il stimula la culture du chanvre dont la Marine faisait grande consommation (pour les cordages, notamment), espérant ainsi diversifier les productions canadiennes.

Rappelé en France en 1726, il laissa  le souvenir d'un homme aimable et cultivé qui fit beaucoup pour la colonie. L'argent qui passa entre ses mains fut pour la plus grande part réinvesti au Canada. Il y dépensa même le prix de vente de l'hôtel d'Alluye dont il se sépara en 1719. Homme de lettres, il échangea une correspondance suivie avec Montesquieu au château de La Brède dans laquelle étaient évoqués les problèmes de la colonisation.

Blois est aussi la ville natale de Charles Guillaume de Bellefont qui épouse Marie-Josèphe Brasserd à Québec en 1733, de Nicolas Duchesne qui se marie à Québec en 1722 et d’Hypolite Thibierge, qui épouse Renée Hervé en 1670 à Château-Richer.