ALPES‑MARITIME
Vence
Vence - Grasse, Bar-sur-loup - Tournon - Die - Romans-sur-Isère - Briançon - Savournon - Saint-Jean-d'Aubrigoux - Saugues - Le Bourg-d'Oisans - Grenoble - Saint-Chef - Veurey-Voroize - Vienne - Ambierle - Champoly Château des Cornes d'Urfé - La Bastie d'Urfé Commune de Saint-Étienne-le-Molard - Saint-Étienne - Saint-Germain-Laval - Saint-Romain-en-Jarez - Toulon - Avignon
Ce village de Provence nous est bien connu grâce aux toiles de Matisse. Ancienne ville romaine puis évêché, cette petite cité médiévale occupe encore ses fortifications adossées aux montagnes. Germain Allart est mort à Vence dont il avait été nommé évêque en remerciement des services rendus au Canada. Louis XIV lui avait demandé, en 1669, de passer au Canada avec quatre missionnaires afin d'y rétablir l'ordre des Récollets, qui avait dû quitter le pays en 1629. Cette mesure visait à diminuer l'influence des Jésuites par l'implantation d'un ordre concurrent. Bien accueilli par la population de Québec, le Récollet fit preuve de diplomatie et sut se garder des pièges, s'attirant cette réflexion élogieuse de Jean Talon: "le père Germain Allart, provincial, a tenu durant tout son séjour une conduite si judicieuse et prudente qu'il emporte 1'estime de ceux même qui semblaient ne devoir souffrir sa présence qu'avec peine". Avant de rentrer à Paris, en 1670 le père Allart plaça la nouvelle maison des Récollets, qu'i1 avait fait édifier pour son ordre, sous la surveillance du gouverneur, montrant ainsi son respect pour l'autorité royale. L'évêché de Vence fut donc la suprême récompense de ce fidèle serviteur du roi. Lors de la célébration en 2004 des 400 ans d’implantation française au Canada, un panneau commémorant l’œuvre de Mgr Allart a été inauguré dans la cathédrale de Vence par l’Association France-Canada.
ALPES ‑ MARITIMES
Grasse, Bar-sur-loup
Si la ville de Grasse environnée de fleurs aux arômes les plus subtils doit sa renommée mondiale aux apothicaires et parfumeurs qui depuis le XVIème siècle ont su maintenir une tradition de qualité, elle présente, aussi, un grand moment de l'histoire de l'Amérique du Nord, relaté dans son musée de la Marine ‑ Mémorial de l'amiral de Grasse.
Nommé par Louis XVI: lieutenant général, commandant de I'armée navale qui doit porter aux Amériques toute l'aide que réclament les « insurgents » américains, l’Amiral de Grasse, réagissant avec un esprit de décision et une promptitude remarquables remportait, le 5 septembre 1781, la victoire navale de la Chesapeake (cap de Virginie) laissant les Français seuls maîtres de la baie et permettant ainsi aux armées commandées par Washington, La Fayette et Rochambeau de se rejoindre et de gagner la guerre. Couronnant l'oeuvre de Washington, « La bataille navale de la Chesapeake a été l'une des plus décisives du monde. Les Etats‑Unis d'Amérique venaient de naître », écrira l'historien britannique H.E. Jenkins.
Non loin de Grasse, dans le pittoresque village du Bar‑sur‑Loup naquit, le 13 septembre 1722, au château familial (dont il reste, aujourd'hui, le corps principal d'habitation), François‑Joseph Paul comte de Grasse, dixième enfant du marquis de Grasse, capitaine de l'armée du roi. Dès son jeune âge il fut destiné à la carrière militaire. Alors qu'il n'avait que douze ans, muni d'une dispense en raison de sa précocité, il fut admis au séminaire de la Marine de Toulon où il acquit une formation très complète portant sur l'arithmétique, l’algèbre, la navigation, l’hydrographie, la construction navale, le maniement des armes, l'épée, le mousquet et le canon. Page du Grand Maître de l'Ordre de Malte il s'initia à l'art de la guerre, de l'administration et de la loi et consacra sa vie au service de son pays. C'est dans la petite église de Tilly, dans les Yvelines, que repose le cœur de ce grand marin.
ARDECHE
Tournon
La ville de Tournon, sur la rive droite du Rhône, mérite une escale pour des motifs aussi historiques que gastronomiques. En effet, si le magnifique collège des Jésuites de Tournon a vu passer deux grands missionnaires canadiens, si le château vit mourir, en 1536, le fils aîné de François Ier, Tournon n'en est pas moins situé face à Tain‑l'Hermitage dont le vignoble est l'un des plus fameux des côtes du Rhône.
Le lycée Gabriel Fauré occupe les bâtiments de l'ancien collège des Jésuites, situé entre le quai Gambetta et la rue Thiers. Fondé par le cardinal de Tournon en 1536, le collège fut l'un des plus brillants foyers intellectuels de la
Renaissance. Plus tard, les Jésuites le réaménagèrent et l'agrandirent au goût du jour, élevant l'élégante chapelle dont les tribunes de part et d'autre de la nef et les peintures en trompe‑l'oeil forment un intéressant ensemble décoratif du xviième siècle. Les pères Biard et Massé sont les deux premiers missionnaires jésuites à avoir foulé le sol acadien. Or, ils avaient tous deux rempli des fonctions au collège de Tournon: le premier comme professeur de théologie, le second en tant qu'économe.
Le père Pierre Biard, originaire de Grenoble, ne devait pas effectuer en Acadie un séjour de tout repos, car l'intransigeant Jésuite n'entendait pas se plier aux volontés du gouverneur Jean de Biencourt de Poutrincourt. Ce dernier, ainsi que son fils Charles de Biencourt de Saint-Just, étaient, du reste, d'une extrême méfiance à l'égard des Jésuites qu'ils accusaient de vénalité et dont il redoutaient le sens politique. D'emblée, les relations furent très tendues entre les chefs de la petite colonie acadienne et le père jésuite qui, se sentant soutenu par la cour, voulait affirmer son autorité et son indépendance.
Le père Enemond Massé, né à Lyon en 1575, sut se faire en Acadie une toute autre réputation. Son esprit pratique le rendit bientôt indispensable et le fit surnommer « le Père Utile ». Évitant le piège des querelles d'influence, il se fit apprécier partout. Après le traité de Saint‑Germain-en-Laye (1632), il dispensa son aide et ses conseils dans la région de Québec jusqu'en 1645, laissant derrière lui le souvenir de son humilité et de son efficacité.
DROME
Die
La région de Die se différencie nettement de l'Isère. Son climat, déjà soumis à l'influence méditerranéenne, est plus doux et la végétation plus méridionale. On y trouve au sud un vignoble assez renommé et un vin blanc délicieux, la « Clairette de Die ».
Die, capitale du Diois, est une ancienne ville romaine qui servait d'étape entre Milan et Vienne, en Isère. Elle a conservé ses remparts et un ancien arc romain réutilisé au Moyen Âge dans la construction de la porte Saint‑Marcel. Un très riche ensemble lapidaire, recueilli dans la région, est exposé au Musée d’Histoire et d’Archéologie de Die (rue Camille Buffardel).
Au milieu de ce quartier ancien où se succèdent les maisons Renaissance (rue Saint‑Vincent et rue Amédée Rousset), la cathédrale reconstruite en 1673, conserve un beau porche roman et une tour du xvème siècle. Elle est donc telle que les colons du Diois l'ont connue lorsqu'ils se rendaient en ville pour la foire ou pour leurs affaires. Cinq colons originaires du Diois ont fondé une famille au Canada: Jacques Barbe que l'on retrouve, en 1743, à Terrebonne ; Benoît Baudin qui se marie, en 1737, à Trois‑Rivières; Charles Desgriteaux, soldat de son métier, qui se marie en 1743 à Montréal; Alexandre Ferriol, dit Lagrenade, baptisé en 1735, qui se marie en 1761 à Montréal avec Claudine Bonsard, et Jacques Rodier, dit Saint‑Martin, qui se marie en 1754 à Québec.
DROME
Romans‑sur‑lsère
Un lacis de vieilles ruelles ponctuées de belles maisons Renaissance dévale la colline. Romans est célèbre dans toute la France pour son activité séculaire: la chaussure. Depuis le xivème siècle, des corporations de sabotiers, de savetiers et de grolleurs y déploient leur art pour chausser, botter tout un chacun, du gentilhomme au gueux. D'abord régionale, cette industrie s'est développée au siècle dernier avec l'apparition des techniques modernes et a bientôt pris une ampleur considérable. La ville a donc décidé de retracer au Musée de laChaussure, rue Sainte‑Marie, l'histoire de cette fidèle amie de l'homme. Quatre mille ans d'histoire de l'homme chaussé sont ainsi présentés au visiteur. Collection unique en son genre qui, parmi des pièces surprenantes et variées, compte plus d'une vingtaine de mocassins canadiens. Le petit Musée ethnographique, situé dans le même bâtiment, abrite des reconstitutions de la vie régionale traditionnelle. Intérieurs et vieux métiers dauphinois, évoqués d'une manière vivante, passionneront les visiteurs canadiens qui pourront découvrir ici le décor de la vie quotidienne de leurs ancêtres originaires de cette région.
HAUTES‑ALPES
Briançon
Véritable forteresse des neiges, Briançon est la plus haute ville d'Europe. Convoitée dès l'époque romaine, la cité frontalière fut fortifiée à plusieurs reprises, mais l'enceinte actuelle a été édifiée sous les directives de Vauban (1692-1722). La ville haute de Briançon a conservé ses rues en pente comme la célèbre Grande‑Gargouille, ainsi surnommée à cause du ruisseau central qui la dévale depuis le xivème siècle. De nombreuses maisons anciennes se dressent encore le long de ses rues, et leurs toits inclinés, couverts de neige en hiver, confèrent à cette ville un caractère presque irréel.
Trois colons canadiens ont passé leur jeunesse à Briançon, défiant chaque jour le piège glissant de la Grande‑Gargouille.
Le premier, Barthélémy Cotton (Couton), dit Fleur‑d'Épée, était chapelier de son métier. Il avait été baptisé dans l'ancienne église Notre‑Dame. Nous le retrouvons en 1691 à Québec, où il épousa Jeanne Lerougé qui lui donna six enfants. Etienne Boniface dit Brindamour et Joseph‑Henri Dubois ont été, eux, baptisés dans la nouvelle église Notre‑Dame‑et‑Saint‑Nicolas qui fut reconstruite à proximité des remparts, en 1703, sur les plans de Vauban. Etienne Boniface s'est marié à Saint‑Vincent‑de‑Paul en 1759 et Joseph‑Henri Dubois à Québec en 1761.
HAUTES‑ALPES
Savournon
Savournon est la ville natale d'un de ces cadets de famille qui, par la fortune des armes, se trouvèrent mêlés à l'histoire canadienne. Philippe-François de Rastel de Rocheblave était issu d'une famille de la petite noblesse provinciale, ruinée par divers procès. Il ne comptait pas moins de vingt frères et soeurs. Aussi fut‑il très tôt orienté vers lacarrière ecclésiastique. Cependant, le jeune homme préféra le métier des armes. Grâce à la protection d'un parent, il parvient aux Antilles en 1748. Dès 1756, il est cité par le gouverneur Pierre François de Rigaud, marquis Vaudreuil‑Cavagnal, pour sa bravoure, lors de la prise d'un fort anglais dans le Maryland. En 1759, il joue un rôle très important dans les combats du Wisconsin, ce qui lui vaut le commandement du fort Chartres Jusqu'en 1763. Sa carrière est alors brutalement interrompue par la cession du Canada aux Anglais. On le retrouve installé pour un temps en Illinois, sur les bords du Mississippi. Cependant, c'est un militaire dans l'âme: durant la guerre de l'Indépendance américaine, il reprend du service sous le drapeau anglais contre les colonies révoltées.
Vers la fin de sa vie, le militaire cède le pas à l'homme politique, définitivement intégré à son pays d'adoption. Il se marie et a quatre enfants: I'un d'eux, Pierre de Rastel de de Rocheblave, sera député de Montréal. Cependant, cette branche de la famille ainsi que les branches françaises, pourtant très nombreuses, se sont éteintes. Seul, l'un de ses frères, Paul de Rastel de Rocheblave, qui le rejoignit en 1758 à La Nouvelle-Orléans, a perpétué le patronyme en Floride et en Louisiane. Une avenue de La Nouvelle‑Orléans célèbre ses exploits dans la défense du nord‑est de la Louisiane et de l'Illinois.
À Savournon, du château natal des Rocheblave (château de Savournon) qui était un bâtiment de type provençal, et d’un caractère très rustique, il ne reste que des ruines.
A Vitrolles, on voit encore, dominant la rive gauche de la Déaule, les ruines du château de Vitrolles qui appartenait à la famille de Rocheblave.
Rappelons également que la région de Gap, d'où sont issus les Rocheblave, entretint longtemps des liens spirituels très étroits avec la province de l'Ontario. Le premier évêque de Bytown (Ottawa), Mgr Guigues, nommé en 1848, était natif de la région, ainsi que les vingt‑trois prêtres missionnaires qu'il encouragea à gagner ce nouveau diocèse.
HAUTE‑LOIRE
Saint‑Jean-d'Aubrigoux
Saint‑Jean‑d'Aubrigoux ne fait partie d'aucun circuit touristique et pourtant ses quelques maisons regroupées autour d'une naïve église des xvième et xviième siècles ont une histoire étonnante.
Saint‑Jean‑d’Aubrigoux est, malgré son isolement, l'un des centres les plus importants de l'émigration du Massif Central vers le Canada, puisqu'une vingtaine de personnes ont quitté le village entre 1660 et 1680.
Que s'est‑il donc passé? Des recherches récentes font remonter ce phénomène à l'influence des Jésuites et à celle de Saint Jean‑François Régis en particulier. Ce dernier désirait devenir missionnaire au Canada. Il en avait fait la demande à ses supérieurs dès 1634. La réponse qui lui fut faite: « Votre Canada à vous sera le Vivarais », devait orienter tout autrement la vie du saint. Jean‑François Régis ayant compris la leçon, exerça désormais son apostolat dans les villages les plus reculés et les plus déshérités du sud‑est du Massif
Central. Mais il conservait toujours autant d'intérêt pour la mission canadienne. Intérêt entretenu par les rapports annuels des Relations des Jésuites du Canada. Jean‑François Régis répandit ainsi son enthousiasme autour de lui et le fit partager à ses paroissiens en leur faisant connaître les dangers, mais aussi les possibilités et les richesses de ce pays neuf. La révélation de ces contrées lointaines ouvertes à toutes les bonnes volontés, parvint à Saint‑Jean‑d'Aubrigoux. Après la longue série noire des guerres de Religion, des famines et de la peste, les habitants prirent alors successivement la décision d'émigrer, encouragés, semble‑t‑il, par le succès des premiers arrivants et la solidarité qui jouait pleinement, au Canada, entre compatriotes et parents.
La plupart d'entre eux, d'abord domestiques des Jésuites, purent, leur engagement terminé, recevoir des concessions à défricher, sur lesquelles ils promettaient de fonder des familles. Parallèlement, ils se livraient bien souvent à latraite des fourrures pour le compte d'un marchand comme leurcompatriote François Chorel.
Ainsi, dès 1666, Vital Oriol et ses cousins Caron sont mentionnés comme domestiques des Jésuites à Charlesbourg. Des terres leur sont concédées sur cette seigneurie et leur agglomération portera un certain temps le nom de " Petite Auvergne ".
Vers 1674, Pierre Moran, natif du bourg de Triouleyre (Thiolières) où l'on voit encore une jolie petite église romane (à deux kilomètres de Saint‑Jean-d’Aubrigoux), s'installe à Batiscan. Il y retrouve ses compatriotes Damien Quatresous et Claude Caron. Au cours des années suivantes, I'émigration s'accélère et un nouveau groupe de colons s'installe dans la seigneurie jésuite de La Prairie de la Magdeleine sur les recommandations de Mathieu Faye. Ce sont Claude Faye, Pierre Bourdeau, les cinq frèresBisaillon (dont Benoît, qui se marie en 1692 à Laprairie), Claude Mesnil, Pierre Drousson, et Claude Caron. Ce dernier avait vendu sa ferme de Batiscan, puis amené de France sa femme, Madeleine Varenne.
La vie de ces colons de Saint‑Jean-d’Aubrigoux s'est déroulée suivant des fortunes diverses: Damien Quatresous, enrichi par son mariage et par la traite des fourrures, devient une personnalité de Batiscan. Son nom ne s'est pas perpétué au Canada, car seules deux de ses filles se sont mariées, s'alliant aux familles Roy, Gouin, et Brunsard. Mais dans la région de Saint‑Jean-d’Aubrigoux, le nom coloré de Quatresous (Quatresols) subsiste toujours.
Mathieu Faye, quant à lui, est le type du colon modèle. Pionnier de La Prairie, il réunit autour de lui ses parents et amis pour défricher et mettre en valeur sa nouvelle paroisse. Ses descendants portent le nom de Lafayette.
Les frères Bisaillon se sont à leur tour lancés dans la vie aventureuse des trappeurs et des coureurs des bois. Trois d'entre eux y ont laissé la vie; les deux autres, après avoir longuement séjourné chez les Illinois, ont implanté leur nom aux Etats‑Unis.
Quant à Vital Oriol, il amasse une belle fortune dans la traite des fourrures, puis s'installe à Québec, où il est reconnu, dès 1666, comme un « bourgeois de la ville ».
HAUTE-LOIRE
Saugues
Saugues est une paisible petite ville de marché. C'est ici qu'est né, au début du xviième siècle, Noël Chabanel, I'un des grands missionnaires martyrs du Canada.
Fils d'un notaire royal, Noël est baptisé en 1613 dans l'église de Saugues où l'on peut encore admirer une Vierge auvergnate du Xlle siècle et une très belle Pietà du xvème siècle. Il entre chez les Jésuites de Toulouse avant d'être envoyé à l'âge de trente ans au Canada. La transition lui semble si pénible et les moeurs des Amérindiens lui font une telle peur que pour résister à son envie de retrouver son cher Toulouse, il fait le voeu solennel de rester au Canada jusqu'à sa mort. Il périra en 1649 de la main d'un de ses apostats de la mission huronne.
La ville de Saugues n’a pas oublié Noël Chabanel : une place porte son nom, et dans l’église, une chapelle et une fresque lui sont consacrées.
ISERE
Le Bourg-d'Oisans
A l'emplacement d'un ancien site lacustre, Le Bourg-d'Oisans est cité pour la première fois au xiième siècle, sous le nom de Saint-Laurent-du-Lac. Le souvenir de cet ancien nom subsiste dans le patronyme de l'église paroissiale Saint-Laurent. Ce bourg en croix autour de son église, reconstruite au xixème siècle, est avant tout un fabuleux carrefour d'excursions pédestres vers les vallées de la Romanche, de l'Eau d’Olle et du Vernon, vers l'Alpe-d'Huez et le massif d'Oisans. Un climat doux et une végétation méridionale en font un enclos privilégié, au paysage verdoyant. C'est dans ce beau cadre naturel que François Viennay-Pachot est né et a été baptisé vers 1628. En 1681, nous le retrouvons, après un premier veuvage, commerçant de la basse-ville de Québec, où il a acheté un magasin. Il est remarié depuis 1680 avec Charlotte-Françoise Juchereau. En 1692, il participe à l'expédition d'exploration du Labrador, commandée par Louis Jolliet, en frétant un navire et en finançant l'expédition.
Viennay-Pachot devait avoir un véritable don pour le commerce, car il amassa sa vie durant une fortune considérable, obtenant même du gouverneur Jacques-René Brisay de Denonville des concessions à perpétuité, le long du Saint-Laurent, pour la pêche et la traite avec les Amérindiens.
Après sa mort, sa femme, qui appartenait à l'une des plus anciennes familles canadiennes, acheta l'île d'Orléans pour y constituer le comté de Saint-Laurent. Mais l'acquisition du titre étant trop onéreuse, Charlotte-Françoise Viennay-Pachot dut bientôt renoncer à implanter, comme l'avaient fait tant d'autres Dauphinois, le nom de la paroisse d'origine de sa famille en terre canadienne.
ISERE
Grenoble
Bien que fort éloigné de l'Atlantique, le Dauphiné et la Savoie ont envoyé au Canada plus d'une centaine de leurs enfants. Nombre d'entre eux étaient soldats ou officiers du régiment de Carignan, levé dans la région, à partir de 1642, par Thomas-François de Savoie, prince de Carignan. Le Fort Barraux, fort militaire de la région de Grenoble rappelle ce départ : c’est en effet de là que partit le régiment de Carignan en 1665. Des ecclésiastiques et des marchands venaient s'ajouter à ces montagnards partant à l’aventure à l’autre bout du monde. Leurs noms: Contrecoeur, Verchères, Sorel, Saint‑Ours, Saint‑Vallier résonnent aujourd'hui encore familièrement à nos oreilles, car ils sont devenus ceux de villes et de villages canadiens. Grenoble et Vienne sont les deux grands diocèses d'origine de la plupart de ces colons. Une plaque apposée en 1996 à Fort Barraux par le délégué général du Québec en France évoque l’aventure en ces termes : « En garnison à Fort Barraux, le régiment franco-savoyard de Carignan infanterie fit campagne au Québec de 1665 à 1669. Quelques 420 officiers et soldats firent souche. Leurs descendants outre-Atlantique sont actuellement 700 000 ».
Grenoble, que les révolutionnaires voulurent plaisamment, mais sans succès, rebaptiser " Grelibre ", doit sa naissance aux Romains qui, les premiers, construisirent un pont sur le Drac, affluent de l'Isère. Au Moyen Âge, Grenoble prospère sous la dynastie des comtes d'Albon seigneurs du Dauphiné. Mais, en 1349, le dernier d'entre eux, ruiné, doit vendre son domaine au roi de France, Philippe VI.
Désormais, le Dauphiné sera l'apanage du fils aîné du roi de France qui portera le titre de Dauphin.
Rattachée à la France, Grenoble conserve des allures decapitale. C'est un centre intellectuel, commercial et aujourd'hui touristique et universitaire qui entretient des relations très suivies avec certaines villes universitaires canadiennes, comme Trois‑Rivières par exemple. Une chaire de francophonie et un centre d'études canadiennes (IEP, Université Grenoble II), ont pour but de promouvoir la connaissance du Canada en France parle biais de cours, de conférences, de séminaires et de stages dans lesquels sont abordés des aspects aussi variés que les sciences politiques, la civilisation, l'histoire ou la littérature. La bibliothèque de Grenoble offre par ailleurs des trésors de renseignements sur la région et des dossiers d'archives très complets sur les émigrés grenoblois.
La vieille ville sur les bords de l'Isère, entre l'église Saint‑André et la cathédrale Notre‑Dame, semble sortie tout droit du passé avec ses maisons sombres, parfois sordides, ses vieilles boutiques, ses rues étroites et venteuses. La plupart des colons qui ont quitté Grenoble ont été baptisés dans l’église Saint‑Hugues ou dans la cathédrale Notre‑Dame elle‑même. Ces deux monuments ne forment plus aujourd’hui qu’un seul ensemble. Les vestiges de l'église Saint‑Hugues (xiiième siècle) constituent la chapelle Notre‑Dame-des-Sept‑Douleurs (à gauche de l'entrée de la cathédrale).
Quatre ecclésiastiques sont nés à Grenoble, dont le père Biard, en 1567. C'est l'un des deux premiers Jésuites à avoir foulé le sol canadien. Il arriva en Acadie en 1610.
Jean‑Baptiste de la Croix de Chevrières de Saint‑Vallier, né en 1653, accepta de partir au Canada malgré la brillante carrière qui s'offrait à lui en France. Devenu évêque de Québec, il fit régner dans l'Église canadienne un climat de rigueur et de sévérité pendant plus de quarante ans. Cette fermeté de caractère lui valut un certain nombre de critiques, mais contribua à consolider l'implantation de l'Église catholique en Amérique du Nord.
François Vachon de Belmont, né en 1645, fut ordonné prêtre à Montréal, puis chargé de la mission amérindienne de la « Montagne », au‑dessus de Montréal. En 1727, il fut nommé supérieur du séminaire Saint‑Sulpice de Montréal et grand-vicaire de l'évêché de Québec. Il est l'auteur d'une Histoire du Canada (1608‑ 1700).
Parmi les officiers du régiment de Carignan‑Salières, deux Grenoblois ont laissé leur nom à des seigneuries canadiennes qui sont devenues aujourd'hui, l'une, une ville importante, l'autre, un gros village: Sorel et Saint‑Ours.
Pierre Saurel (Sorel), baptisé en 1628 à Notre‑Dame, est capitaine de compagnie au régiment de Carignan. C'est l'un des principaux chefs de la campagne iroquoise de 1665‑1666. Dès son arrivée à Québec, en été 1665, sa compagnie est acheminée vers le confluent de la rivière Richelieu. Elle y bâtit un fort qui, six ans plus tard, prend le nom de Sorel. En 1666, Sorel dirige une expédition victorieuse contre les Agniers. C'est alors que l’Intendant Jean Talon lui concède une seigneurie qui passera, par la suite, dans la maison Ramezay. A cette même époque, il épouse une des filles de l'importante famille Legardeur de Tilly.
Pierre de Saint‑Ours est né en 1640 et a été baptisé en à 1641 à l’église Saint‑Hugues. Il est lui aussi capitaine de compagnie lorsqu'il arrive au Canada, en 1665 avec le régiment de Carignan. Sa participation à la campagne contre les Agniers lui vaut également une seigneurie sur les bords du Saint‑Laurent, entre celles de ses deux compatriotes, Sorel et Contrecoeur. Personnages hauts en couleurs, accédant à la propriété et parfois à la noblesse comme les premiers féodaux, les armes à la main, ces nouveaux seigneurs, qui maniaient aussi bien la charrue que l'épée, ont une place de choix dans l'épopée canadienne.
Derrière eux viennent les fondateurs de familles: Jean-Baptiste Billiau dit l’Espérance et Patoka, tisserand à Détroit en 1758; Georges Borne dit Larose, qui se marie à Saint‑Vallier en 1760; Jacques Boudillon dit Grenoble, fils de teinturiers, qui s'installe à Montréal en 1761. Joseph Corran, dit Dauphiné, est caporal pendant la guerre franco-anglaise de 1756 à 1763. Il se marie à Québec en 1758. Edmond Michon, lui, est sergent; il se fixe à Montréal en 1760. Claude Remont, probablement soldat lui aussi, se marie en 1757, à Québec.
ISÈRE
Saint‑Chef (jumelage avec Contrecoeur), Versin, Verchères
Ce petit coin de terroir dauphinois est le berceau de deux joyeux aventuriers dont les noms résonnent encore aujourd'hui dans l'histoire et la toponymie canadienne.
Antoine Picou, dit Contrecoeur, alias Pécaudy de Contrecoeur, et son jeune neveu, le lieutenant François Jarret, né au hameau de Verchères (à l'ouest de Saint‑Chef) en 1641, formaient une belle équipe.
Picou, né en 1592, avait parcouru à peu près tous les champs de bataille d'Europe, combattu en Italie sous Richelieu et en France durant la Fronde.
Il avait, à quarante ans, acquis une forme de courage insouciant et une sorte de cynisme qui faisaient de lui, de bon coeur ou à contrecoeur, le chevalier de toutes les audaces sur le chemin de la fortune. Mais Picou songeait à se ranger de la vie militaire. Il jeta donc (en 1652) son dévolu sur une riche veuve, Anne Dubois, qui possédait à Versin, hameau de la commune de Saint‑Chef, les terres et la maison de Grand'Chana. Picou se voyait fort bien menant à Grand'Chana une vie de rentier aisé, au milieu d'une cour de benêts locaux impressionnés par les récits, sans cesse améliorés, de ses aventures. Hélas, les deux nouveaux époux n'étaient pas faits pour s'entendre et la méfiance avare de la veuve Dubois n'avait d'égale que l'avidité et la prodigalité du jeune marié de quarante‑cinq ans découvrant l'aisance. Les coups succédèrent bientôt aux querelles et les procès aux coups. Le coureur de dot déshérité du vivant de sa femme, se vit chassé des mesquineries de l'aventure bourgeoise et contraint de reprendre du service dans l'armée.
Le régiment de Carignan, dans lequel il était capitaine de compagnie, partait alors au Canada. Picou le suivit et débarqua à Québec en août 1665. À soixante ans passés, le gaillard se taille rapidement une réputation d'audace et de bravoure dans la guerre iroquoise à laquelle il s'adapte avec une vitalité et un tempérament surprenants. Il y acquiert ses titres de noblesse (définitivement entérinés après sa mort) et une seigneurie entre celles de ses compagnons Sorel et Verchères. Puis, satisfait de la tournure que prennent les évènements, il se remarie à soixante et un ans et a trois enfants.
Mais sa carrière est loin d'être finie. En 1673, à 1'âge de soixante‑dix ans, son expérience militaire et canadienne le fait à nouveau appeler par le gouverneur Louis de Buade, comte de Frontenac pour aller fonder le fort Frontenac, sur les bords du lac Ontario, en plein territoire iroquois.
Personnage fabuleux de son vivant, Contrecoeur a un peu été oublié depuis sa mort en 1683. Réhabilitons donc ce vieux soldat jovial des temps héroïques du Canada. Sa vitalité colorée vaut peut‑être toutes les vertus.
Saint‑Chef, son village natal, est une belle excursion au coeur du Dauphiné. Situé à flanc de colline, le bourg est un ancien lieu de pèlerinage au « chef » (tête) de Saint‑Theudère, conservé pieusement à l’église-abbatiale. C'est dans cette église romane, décorée de fresques du xiième siècle, que François Jarret a été baptisé et qu'Antoine Picou a conclu son malheureux mariage avec Anne Dubois. Un château Renaissance surplombe ce village où se joua le sort de nos deux héros. On peut aussi y voir la maison de la famille Contrecoeur. C’est une demeure privée qui a malheureusement été dénaturée par les restaurations successives.
François Jarret était le fils de Claudine Picou, soeur d'Antoine. Il fut donc, très jeune, placé dans l'orbite de cet oncle brillant qui avait gagné ses galons de capitaine par sa seule bravoure.
En 1665, il suit son oncle au Canada et, sous ses ordres, en tant que lieutenant, se distingue au combat. Ce qui lui vaut une seigneurie à côté de celle de Contrecoeur. Mais les deux compagnons n'ont pas été placés là par hasard.
Leurs seigneuries, ainsi que celle de leur compatriote Saint‑Ours, sont parmi les plus exposées aux attaques des Iroquois quitraversent leurs domaines pour éviter le fort Sorel. Jarret doit donc très vite fortifier sa seigneurie, à laquelle ildonne le nom de son village natal: Verchères. Il est néanmoins en butte à de perpétuelles escarmouches dans lesquelles il perd deux gendres et un petit‑fils. Cependant, c'est au cours d'une de ces embuscades que la famille de Verchères va acquérir ses plus beaux titres de gloire. Marie‑Madeleine de Verchères, dite Madelon, sa fille, s'inscrit dans la lignée des grandes héroïnes guerrières en défendant, presque seule, à l'âge de quatorze ans, le fort de Verchères attaqué par les Iroquois.
À Saint‑Chef, Versin, Verchères, l'écho des bruyants soldats de Carignan s'est tu. Mais par un juste retour des choses, les archives de la famille Contrecoeur (Picou) ont trouvé un refuge digne des ambitions du vaillant ancêtre. Conservées depuis le XVIIe siècle par la famille Dubois, elles sont aujourd’hui déposées au château de Faverges-de-la-Tour à quelques kilomètres de Saint-Chef.
ISERE
Veurey‑Voroize (jumelage avec Deschaillons sur Saint-Laurent au Québec), Le Bec de l'Échaillon
Les amateurs de marche à pied et de montagne pourront seuls entreprendre cette longue excursion de trois heures qui mène au sommet du Bec de l'Échaillon. Ce nid d'aigle imprenableétait le bastion des Saint‑Ours. Les ruines du château, une chapelle et quelques tombes envahies par la végétation en rappellent I 'époque héroïque.
Au xviième siècle, la vieille famille de Saint‑Ours connut des revers de fortune. Pierre de Saint‑Ours et son frère Louis, seigneur de l'Échaillon, durent donc s'engager dans les rangs du régiment de Carignan. En 1659, le prince de Carignan offrit son régiment au roi Louis XIV. Celui‑ci, tablant sur l'endurance de ces soldats de montagne habitués au froid et à la neige, décida de les envoyer au Canada en mai 1665. Ils arrivaient ainsi à point pour combattre les Iroquois dont la menace était de plus en plus lourde pour la colonie canadienne. Placé sous les ordres du colonel de Salières, le régiment prit alors le nom de Carignan‑Salières.
Ces hommes allaient avoir un rôle primordial dans l'histoire de la Nouvelle‑France, car, en plus d'une aide militaire, ils fournissaient un apport de population indispensable à la survie du pays. Des conditions exceptionnelles furent donc offertes aux soldats qui acceptaient de s'implanter au Canada; bien plus, l’Intendant Jean Talon fit venir à leur intention quelque neuf cents filles à marier, orphelines de bonne moralité et de bonne santé, dotées par le roi, que l'on appela désormais « les Filles du roi ».
Plus de huit cents hommes s'installèrent sur les importantes seigneuries concédées à leurs capitaines, formant la base des villages qui portent aujourd'hui encore les noms de leurs compagnies: Chambly, Contrecoeur, Sorel, Saint‑Ours.
Pierre de Saint‑Ours était entré au régiment de Carignan à l'âge de 14 ans. En 1664, héritant du patrimoine familial, il put acquérir une commission de capitaine au régiment de Carignan- Salières, juste avant son départ pour le Canada. Dès son arrivée, il prit une part active à la guerre iroquoise, combattant sous Tracy, contre les Agniers, puis participa à la fondation du fort Frontenac et à la défense du fort Chambly. Il reçut, en récompense, des terres le long de la rivière de l'Assomption (1672), puis hérita de Saint‑Jean Deschaillons (près de la rivière Duchesne) de son frère. Marié en 1668 à Marie Mullois qui lui donna onze enfants, Pierre de Saint‑Ours avait reçu, dès cette époque, sa plus importante concession située entre Sorel et Contrecoeur. Il lui avait donné le nom de Saint-Ours et y avait construit un manoir. Par la suite, il fragmenta son domaine entre les soldats de sa compagnie qui devinrent ses censitaires. Ainsi, dès 1681, Saint‑Ours comptait déjà plus de quatre‑vingts habitants. La vie n'était pourtant pas facile à Saint‑Ours dans ces années‑là. Très exposée aux attaques iroquoises, la seigneurie était périodiquement dévastée et les victimes étaient nombreuses. Pierre de Saint‑Ours envisageait même son retour en France, lorsque le gouverneur Jacques René de Brisay de Denonville, informé des malheurs de sa famille, le fit nommer capitaine des Compagnies Franches de la Marine de Montréal. Grâce à cette aide, les Saint‑Ours purent retrouver une certaine aisance et rester au Canada.
A Veurey-Voroize, la plantation d’un érable dans le parc de la mairie et l’existence d’une rue Deschaillons symbolisent les liens forts qui unissent la commune et le Canada.
ISERE
Vienne
Vienne la blonde, première ville du Midi après Lyon, est célèbre pour la richesse de son patrimoine. L'ancienne cathédrale Saint‑Maurice, les églises, les cloîtres romans attirent les visiteurs, tout comme la beauté des vestiges gallo-romains très importants à Vienne . Au détour des rues au tracé encore médiéval, le temple d'Auguste et de Livie, les thermes, le grand théâtre se succèdent sur la rive gauche où se regroupaient les édifices religieux et administratifs de la ville romaine, tandis que le quartier commercial et résidentiel était établi sur la rive droite (site de Saint‑Romain‑en‑Gal).
Jean de Lauson, ancien directeur de la Compagnie des Cent‑Associés du Canada, promu gouverneur de la Nouvelle‑France en 1651, avait été pendant de nombreuses années, intendant de Vienne. Habile financier, il avait joué un rôle important dans les affaires publiques de cette ville et avait réussi, dès cette époque, à se faire concéder de vastes domaines au Canada. C'est pourquoi les fondateurs de Ville-Marie durent s'adresser à lui en 1640 lorsqu'ils voulurent installer leur ville missionnaire dans l'île de Montréal qui lui appartenait. Lauson, qui espérait tirer parti de ses possessions, commença par refuser. Quelque temps après, comprenant les avantages diplomatiques de cette opération dans laquelle étaient engagées les plus grands noms de la cour, il finit par céder aux instances du père Lalemant. L'acte de donation fut signé à Vienne, le 7 août 1640.
Joseph de La Colombière est né à Vienne en 1651. Sulpicien, il devint, sur la demande de son compatriote, Mgr de Saint‑Vallier, vicaire général de Québec jusqu'en 1723.
Joseph‑Pierre Bernier est le troisième Viennois à s'être illustré sans l'histoire canadienne. Le baron Jean-Armand de Dieskau, sous les ordres duquel il avait servi au régiment Royal‑Suédois, se l'attacha comme aide de camp et I'emmena au Canada. En 1755, lorsque le baron de Dieskau fut fait prisonnier, Bernier le rejoignit en captivité. Il revint au Canada en 1758, comme commissaire des guerres. Après la chute de Québec, il s'occupa de soulager les malades et les blessés et regagna la France avec le chevalier François-Gaston de Lévis en 1760.
Le diocèse de Vienne a également apporté sa petite pierre à l'édification du Canada. On compte une douzaine de colons pour la plupart soldats dans les troupes de Dieskau et de Montcalm. Deux d'entre eux, cependant, appartiennent à la génération de Carignan: André Jarret, cousin germain de Jarret de Verchères, baptisé à Royas en 1644; officier de régiment dans la compagnie de Contrecoeur, il reçoit les îlots du Saint-Laurent, proches de l'île Longue qui est concédée à son cousin; il se marie en 1676 à Montréal et a huit enfants. François Lenoir, baptisé en 1642, se marie à Montréal en 1673, soit trois semaines après son arrivée, pour être autorisé à pratiquer un trafic commercial avec les Amérindiens. Ce négoce était interdit aux célibataires qui pouvaient prendre goût à la vie des bois et refuser, par la suite, de fonder une famille.
Quant aux autres soldats originaires du Viennois, notons: Claude Corby, né à Clérieux (Drôme) et marié à Québec en 1726; Claude Astier, marié à Chambly en 1756; André Chauvet, baptisé à Villeneuve en 1733; Pierre Descheaux, marié en 1759 à Trois‑Rivières; Jean‑Baptiste Falard, de Glun (sur la rive droite du Rhône), marié en 1740; Jean Jeanton, dit Dauphiné, charpentier du Charaix (commune de Saint- Christophe‑de‑Laris), marié à Québec en 1751; François Jacquiers, baptisé en 1729 à Saint‑Jean de Bourgoin et marié en 1752 à Québec; Jean Grenier, marié à Chambly en 1753 et Pierre Guyon, né à Saint‑Martin de Vienne et marié à Saint‑Joseph‑de‑Beauce en 1760.
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Ambierle
Etagée à flanc de colline, Ambierle est surmontée par les bâtiments de l'ancienne abbaye bénédictine (xiième‑xiiième siècles). L'église priorale Saint‑Martin, qui date de la fin du xvème siècle, est richement décorée de sculptures et de vitraux. Elle abrite un merveilleux retable de l'école burgondo‑flamande (1466). Mais cette église a encore un autre intérêt. On y voit le tombeau de Mgr Jean‑Marie Odin, premier évêque du Texas et deuxième archevêque de la Nouvelle‑Orléans qui revint en 1870, après cinquante ans d'évangélisation en Amérique du Nord mourir à Ambierle, sa ville natale.
Le Musée Alice Taverne attirera également les amateurs d'art et de traditions populaires. Dans les salles d'une belle maison du xviiième siècle sont réunis meubles, costumes et ustensiles régionaux traditionnels, du xviiième et du xixème siècle, qui donnent une vision très vivante du monde que les colons du Massif central ont quitté pour gagner le Canada.
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Champoly Château des Cornes d'Urfé
Les Cornes d'Urfé, bâties du xiième au xivème siècle sur un belvédère naturel dont la vue s'étend loin au nord et à l'ouest, sur les collines du Bourbonnais et la chaîne des Dômes, sont le berceau de la famille d'Urfé et le resteront jusqu’au xviiième siècle.
Restauré à plusieurs reprises du xvème au xviième siècle, le château fut malheureusement pillé pendant la Révolution, puis démantelé au xixème siècle. On retrouve à Saint‑Just, à Vaudier, à Saint‑Marcel d'Urfé, des cheminées, des portes, des pierres moulurées qui proviennent du pillage du château dont il ne reste qu’un donjon de 18 mètres et un escalier intérieur. Trois autres tours et les courtines sont en cours de restauration. Le site des Cornes d'Urfé n'en est pas moins grandiose. Perdues dans la forêt, les ruines déchiquetées évoquent fort bien la vigueur et la violence de ces seigneurs dont le nom vient, dit‑on, de l'allemand Wolf. Avec la Renaissance, la famille d'Urfé se police, quitte son nid d'aigle et acquiert des fonctions à la cour. Les " loups " apprivoisés, assagis, vont reporter leur énergie sur la diplomatie, la littérature et la religion: trois domaines où ils brilleront particulièrement. L'un, Claude (1501 ‑1558), représentera le roi au Concile de Trente et sera ambassadeur auprès du pape. Un autre, Honoré d'Urfé (1567‑1625), acquiert 1'immortalité grâce à son roman l'Astrée, l'un des premiers romans français qui aura une influence immense dans l'art et la littérature du xviième et du xviiième siècle.
François (1639‑1701), enfin, transportera à l'autre bout du monde le nom de sa famille. Missionnaire au Canada, il y fonde la ville qui, aujourd'hui encore, porte son nom, Baie-d'Urfé.
Le pays qui s'étend autour des Cornes d'Urfé est une région de montagnes moyennes où la nature a conservé tout son charme. Un artisanat local et un système original de tables d'hôtes, où l'on peut déguster les productions naturelles du pays (miel, lait, fruits, légumes, fromage), offrent aux visiteurs un aperçu aimable de la vie régionale et traditionnelle.
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La Bastie d'Urfé Commune de Saint‑Étienne‑le‑Molard
La Bastie d'Urfé occupe une place de première importance dans la littérature et dans l'art, puisqu'elle vit naître l'Astrée dont les aventures pastorales se déroulent sur les bords du Lignon. C'est dans ce décor champêtre et vallonné qu'Honoré d'Urfé, passionnément épris de sa belle‑soeur, recréa une Arcadie peuplée de faunes et de silènes. Le château, remodelé par Claude d'Urfé, aïeul d'Honoré, à son retour de Rome en 1535, est le premier exemple de la Renaissance italienne en Forez. Un bâtiment plein de poésie, d'invention et de charme dont la salle de fraîcheur,dite de Rocailles toute tapissée de coquillages et de faïences polychromes, et la galerie à l'italienne évoquent encore la richesse passée (les boiseries de la chapelle sont conservées au Metropolitan Museum de New York). La Bastie est agrémentée d’un jardin, qui, au xvième comprenait parterre, dédale, bassin, et fontaine de marbre blanc et était bordé par un canal. La Bastie a subi l’outrage des temps, mais grâce à une restauration menée en grande partie à l’aide à de documents d’époque, le bâtiment que nous admirons aujourd’hui est sans doute proche de celui que la familled’Urfé a connu.
François-Saturnin Lascaris d'Urfé, petit‑neveu d'Honoré, est né en 1641. François-Saturnin Lascaris d'Urfé était prêtre sulpicien. Sur sa demande, il fut envoyé au Canada, en 1668. Il se vit alors attribuer une mission qui n'était pas pour déplaire à un jeune et vaillant gentilhomme campagnard. En compagnie de son cousin François de Salignac de la Mothe‑Fénelon, le voici chargé du " camp volant " de Kenté qui suit les Amérindiens dans leurs expéditions de chasse. Les deux jeunes missionnaires, pleins d'enthousiasme et d'héroïsme, se révèlent d'habiles trappeurs, ce qui est indispensable si l'on veut gagner l'estime des chasseurs amérindiens mais aussipouvoir les suivre.
Malgré l'amitié qu'ils portent aux deux jeunes gens, les Amérinndiens ne sont pas prêts à renoncer à leurs croyances ancestrales et la tâche d'évangélisation se révèle longue et difficile. Cependant, le jeune Fénelon a des démêlés avec le gouverneur Louis de Buade de Palluau, comte de Frontenac. François-Saturnin Lascaris d'Urfé, qui tente de le défendre, se sent lui aussi menacé par l'animosité du gouverneur qui n'hésite pas à faire ouvrir son courrier. Ulcéré, l'abbé François-Saturnin Lascaris d'Urfé regagne la France. Il est fort bien en cour, car il vient d'entrer par alliance dans la famille Colbert. Le comte de Frontenac est sévèrement tancé.
Quant à François-Saturnin, qui espère bien regagner le Canada au plus vite, il lui faudra attendre, faute d'argent, la nomination du nouvel évêque de Québec, Mgr. de Saint‑Vallier, pour se faire emmener à titre de conseiller et de guide. Quelques temps après son retour, il devient le premier curé de Saint‑Louis du Haut‑de‑l'Ile dont la pointe, dite Pointe‑à-Caron, constitue une partie de l'actuelle baie d'Urfé. Sa paroisse ayant été pillée en 1687, François-Saturnin regagne à nouveau la France. Il devait mourir en 1701, à Bagé‑le‑Châtel (Ain).
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Saint‑Étienne (jumelage avec Granby au Québec et Windsor en Ontario)
Malgré la magnificence des monts du Forez et les belles forêts du Pilat qui s'étendent à quelques kilomètres de là, Saint‑Étienne est une ville industrielle et grise qui n'attire pas le visiteur.
Pourtant, nous conseillons une halte aux passionnés d'armement militaire, aux fanatiques des armes à feu ou, tout bonnement, aux amateurs d'histoire qui découvriront ici une des plus belles collections de France.
Saint‑Étienne est, depuis la fin du xviième siècle, le siège d'une des plus grandes manufactures royales d'armes, transformée en manufacture nationale depuis la Révolution.
Le Musée d’Art et d’Industrie de Saint-Etienne abrite une très importante collection d’armes (la plus importante de France après celle du musée de l’Armée), digne témoin des productions de la manufacture. Dans les salles consacrées à cette collection, vous découvrirez des pièces rares des origines à nos jours, et, particulièrement, des fusils des xviième et xviiième siècles, semblables à ceux utilisés au Canada dans la guerre franco-iroquoise puis dans les guerres franco-anglaises. Durant tout le xviiième siècle, Saint-Etienne partagea, avec Charleville et Tulle, le monopole de la fabrication des fusils de traite destinés soit à la chasse, soit à l’échange. On observera des spécimens de ce fameux fusil de traite que les Amérindiens obtenaient en échange de fourrures. Le fusil, suivant sa taille et l’éloignement du point de vente, atteignait, vers 1740, la valeur de onze à quatorze peaux de castor. Cependant, le fusil de traite de Saint-Etienne n’avait pas la qualité du fusil de chasse de Tulle et la concurrence était sévère sur le marché canadien. Les marchands n’hésitaient pas à refuser les armes qui ne plaisaient pas aux Amérindiens devenus peu à peu de difficiles connaisseurs. C’est pourquoi, les manufactures françaises, qui s’assuraient de confortables débouchés au Canada, se virent obligées de tenir compte des exigences et des goûts d’inhabituels clients : les Amérindiens du Canada.
Saint-Etienne est jumelé avec Granby au Québec et Windsor dans l’Ontario depuis juin 1963. Parallèlement, l’université Jean Monnet de Saint-Etienne propose à ses étudiants des programmes d’études leur permettant d’effectuer une partie de leur scolarité au Canada.
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Saint-Germain-Laval
Saint-Germain-Laval, dont l’église du xivème siècle domine la rive gauche de l’Aix, a conservé dans ses quartiers anciens de nombreuses maisons intéressantes. L’une d’elles, belle demeure à pans de bois sur trois piliers de pierre, est signalée par une plaque (place de la Mairie). C’est la maison natale de Daniel Greysolon Dulhut, né en 1639.
Daniel appartenait à une famille de petite noblesse. Il reçut donc une certaine éducation, avant d’embrasser la carrière militaire. En 1665, il s’engage dans le corps des Gendarmes, régiment d’élite de la Maison du roi, où seuls les membres de la noblesse étaient admis.
Après avoir fait ses preuves au cours des guerres européennes, il gagne le Canada en 1675, mais, cette fois-ci, comme capitaine dans les troupes de la Marine. Dès son arrivée, il se lance dans la vie aventureuse des explorateurs et des coureurs des bois. Il va ainsi se consacrer, pendant plus de vingt ans, à l’exploration de l’ouest canadien, s’attirant la sympathie et l’estime des tribus amérindiennes qu’il côtoie. Il explore les sources du Mississippi, crée des comptoirs de traite à l’extrémité ouest du Lac Supérieur, patronne la construction d’un poste à l’emplacement de Détroit, commande au fort de Frontenac.
Si cette activité débordante n’est pas, comme le sous-entendent ses ennemis, totalement désintéressée –Daniel Greysolon Dulhut et son frère Claude Greysolon de la Tourette s’enrichissent considérablement dans la traite des fourrures- le rôle de Daniel Greysolon Dulhut n’en est pas moins primordial en ce qui concerne la consolidation les relations franco-amérindiennes de l’époque et la découverte de l’ouest canadien.
Loire
Saint-Romain-en-Jarez
François Chorel, sieur de Saint-Romain, est originaire d’une famille de Saint-Romain-en-Jarez. Né en 1640 dans la région de Lyon, il passe en Nouvelle-France vers 1660 et épouse, en 1663, Anne-Marie Aubuchon, qui lui donne dix-neuf enfants. Dès son arrivée, il se lance dans le commerce et la traite des fourrures avec succès. Cependant, il choisissait de préférence ses associés parmi ses compatriotes du MassifCentral (Pierre Moran, de la région de Saint-Jean-d’Aubrigoux, fit, par exemple, pendant longtemps, le trafic de fourrures pour son compte). François Chorel, dans la mesure de ses possibilités, les aidait et leur fournissait du travail jusqu’à leur établissement. Ainsi, nombre d’Auvergnats firent leurs premières classes canadiennes chez lui. Ils étaient assurés d’y trouver compréhension et travail. Car habitués à un climat assez rude, à la neige et à la chasse dans le MassifCentral, ces Auvergnats étaient, mieux que d’autres, préparés au dur métier de trappeur canadien. François Chorel fait donc des affaires. Il peut ainsi, dès l'ouverture de la seigneurie de Champlain, prendre le titre de sieur de Saint Romain et acquérir des terres. Il y avoisinait avec Antoine Desrosiers, originaire de la même région que lui, tandis que de nombreux Auvergnats s’installaient dans les seigneuries de Batiscan et de La Prairie.
VAR
Toulon
En partie détruite par les bombardements d’août 1944, Toulon présente aujourd’hui une figure résolument moderne. Cependant, derrière le vieux port, la ville ancienne se replie sur ses rues étroites bordées de hautes maisons aux crépis jaunes qui évoquent déjà l’Italie.
De 1679 à 1701, la ville de Toulon fut complètement restructurée. Vauban dirige une partie des travaux d’édification des remparts, de l’arsenal et des bâtiments militaires aujourd’hui détruits, dont seule subsiste la porte monumentale de l’arsenal. Il n’est donc pas étonnant qu’un des plus fameux architectes canadiens ait vu le jour à Toulon à cette époque. Issu, en 1682, d’une famille d’ingénieurs, Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry peut suivre sur le terrain les leçons d’architecture de Vauban. Durant sa jeunesse, il fait de nombreux plans et sert dans l’armée en qualité d’ingénieur. Puis, attaché au ministère de la Marine, il est envoyé en 1716 à Québec pour réviser les fortifications de la ville. Cette mission temporaire s’étant muée en nomination permanente au poste d’ingénieur en chef du roi en Nouvelle-France, Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry s’installe au Canada. On lui doit les fortifications de Québec et de Montréal, les forts Niagara, Chambly, Saint-Frédéric, Sault-Saint-Louis, le plan de la façade de l’église Notre-Dame de Montréal et la rénovation du château des gouverneurs de Québec.
Daniel Rémy de Courcelle a, lui aussi, vu s’édifier les fortifications de Toulon. Il en fut gouverneur et y est vraisemblablement mort en 1698. Cependant, une première partie de sa carrière s’est passée en Nouvelle-France, où il exerça la charge de gouverneur, de 1665 à 1672. Arrivé en même temps qu’Alexandre de Prouville, marquis de Tracy, il eut à s’occuper du difficile problème iroquois, puis à maintenir une paix sans cesse remise ne cause. Pendant toutes ces années, il sut déployer une habileté et une diplomatie qui forcèrent au respect alliés amérindiens et ennemis. Par ailleurs, il ne cessa de favoriser l’exploration de l’ouest Canadien.
Hasard de l’histoire, trois siècles après la venue de Toulonnais au Canada, ce sont des Canadiens qui ont débarqué à Toulon, pour une opération de grande envergure : sa libération! Les Canadiens ont en effet très largement contribué au succès du débarquement de Provence en 1944. Sur les hauteurs de la ville, le mémorial du débarquement de Provence du Mont-Faron, qui consacreune salle au rôle joué par les Canadiens dans le débarquement de Provence, témoigne de la gratitude de Toulon envers le Canada.
Vaucluse
Avignon
Situé aux limites de l’ancien comté de Provence, sur la rive gauche du Rhône, Avignon doit sa fortune, dès le début du Moyen Âge, à sa position stratégique. Il faut cependant attendre le xivème siècle et l’élection d’un pape français (1309) pour voir Avignon prendre place dans l’histoire internationale. En effet, le nouveau papa, Clément V, ne rejoint pas Rome déchirée par les factions, mais préfère s’installer à Avignon. Dès lors, la ville va devenir la capitale du monde chrétien. Hommes d’affaires, courtisans, banquiers se pressent dans l’entourage du pape et se font construire hôtels et demeures somptueuses à l’imitation du palais papal. Une population très nombreuse (30 000 habitants) et cosmopolite favorise le développement de la vie culturelle et artistique.
Après le départ des papes (six d’entres eux se sont succédés à Avignon), la ville continue d’être administrée par le Saint-Siège et cela jusqu’à la Révolution. Au xviième siècle, la création artistique est intense à Avignon, et ses artistes rayonnent dans toute la Provence. Le père Etienne Martellange fait alors les premiers dessins de la chapelle du collège des Jésuites (construite de 1620 à 1661) dont l’architecte François de Royers de la Valfenière poursuit les travaux, introduisant à Avignon un fort bel exemple du style baroque italien. Cette chapelle était séparée du collège lui-même par une petite ruelle que les Jésuites voulaient racheter à la ville d’Avignon. Cette dernière, après avoir refusé, donna finalement les fonds pour construire, en 1644, le pont couvert qui relie encore aujourd’hui le collège (actuel lycée), à la chapelle (transformée en musée lapidaire). Enemond Massé, l’un des deux premiers missionnaires jésuites à avoir posé le pied en Nouvelle-France, fit son noviciat ici. Fils de boulanger, il était né à Lyon en août 1575.